Le début du mois a été marqué par une chute importante du marché des actions. Cette baisse soudaine a ravivé l’intérêt des investisseurs pour les obligations, rapporte Thinkadvisor.
Pendant que l’indice S&P 500 perdait environ 6 % au cours des trois premiers jours de négociation en août, le marché obligataire affichait des gains de près de 2 %. Dans ce contexte, les portefeuilles traditionnels « 60-40 », composés de 60 % d’actions et de 40 % d’obligations, ont surperformé ceux investis exclusivement en actions.
Ce retour en scène inopiné des obligations a surpris de nombreux observateurs. La relation traditionnelle entre actions et obligations, où les revenus fixes compensent les pertes lorsque les actions s’effondrent, a en effet été remise en question plusieurs fois au cours des dernières années.
Par exemple, en 2022, les obligations ne protégeaient plus contre la baisse des actions, en grande partie à cause de l’inflation galopante et des hausses agressives des taux d’intérêt décrétés par la Réserve fédérale américaine (Fed). Ces mesures avaient semé la crainte d’une récession imminente.
Cependant, avec le début de la baisse des taux d’intérêt et l’anticipation de nouvelles réductions au cours des prochains mois, l’intérêt pour les obligations s’est rapidement accru. Bien que les obligations aient effacé une partie de leurs gains à la suite de la stabilisation des actions, elles ont prouvé leur utilité en tant que couverture lors des périodes de turbulences sur les marchés, selon les experts consultés par Thinkadvisor.
George Curtis, gestionnaire de portefeuille chez TwentyFour Asset Management, a ainsi déclaré avoir acheté de la dette publique en prévision d’un retour à la corrélation inverse entre actions et obligations, à mesure que l’inflation diminue. Il s’agit d’une couverture, estime-t-il.
Selon lui, la relation inverse traditionnelle entre les actions et les obligations semble de nouveau se manifester. La corrélation sur un mois entre ces deux classes d’actifs a atteint son niveau le plus négatif début août, un niveau qu’on n’avait pas observé depuis la crise des banques régionales de l’année dernière.
Cette relation entre les actions et les obligations avait été bouleversée par les hausses de taux de la Fed à partir de mars 2022. Elles avaient provoqué une chute simultanée des actions et des obligations. En conséquence, le portefeuille « 60/40 » avait perdu 17 % de sa valeur, sa pire performance depuis la crise financière de 2008.
Aujourd’hui, le contexte est de nouveau favorable aux obligations, car l’inflation est mieux maîtrisée et les inquiétudes se concentrent désormais sur une possible récession aux États-Unis. Les rendements des obligations restent supérieurs à leur moyenne sur cinq ans.
Toutefois, les investisseurs intéressés par les obligations doivent être attentifs à certains risques. Les rapports de juillet sur les prix à la production et à la consommation aux États-Unis seront déterminants.
Malgré l’enthousiasme actuel pour les obligations, l’heure est à la prudence, suggèrent des analystes. Bill Eigen, gestionnaire du JPMorgan Strategic Income Opportunities Fund, a maintenu plus de la moitié de son fonds de 10 milliards de dollars en liquidités ces dernières années, principalement dans des fonds du marché monétaire investis dans des actifs réputés comme sûrs, tels que les bons du Trésor.
Selon l’expert, à un peu plus de 5 %, les bons du Trésor à court terme offrent des rendements supérieurs d’au moins un point de pourcentage à ceux des obligations à long terme. L’analyste croit que l’inflation n’est pas suffisamment maîtrisée pour permettre le type d’assouplissement de la Fed qui changerait cette dynamique. « Le principal problème des obligations en tant que couverture est que nous sommes toujours dans un environnement inflationniste », affirme-t-il.
Ira F. Jersey et Will Hoffman, stratégistes chez Bloomberg Intelligence, croient pour leur part que l’inversion exceptionnellement brève de la courbe du Trésor à 2 ans/10 ans qui s’est produite le 5 août, avec la chute du marché des actions, pourrait présager une tendance à la hausse qui persistera à mesure que l’économie ralentit. Entre-temps, ils pensent que la corrélation entre les actions et les obligations est en train de se normaliser.
Par ailleurs, les rendements des obligations à deux ans ont été brièvement inférieurs à ceux des obligations à dix ans pour la première fois en deux ans, ce qui indique que le marché se prépare à une récession et à des réductions rapides des taux d’intérêt, rapporte Thinkadvisor.
Daniel Ivascyn, directeur des investissements chez Pacific Investment Management Co pense ainsi que les obligations vont retrouver davantage leurs caractéristiques défensives à mesure que l’inflation diminuera et que les risques deviendront plus équilibrés.