Les investisseurs à la recherche de revenu et pour qui les FNB d’actions privilégiées sembleraient une offre alléchante auraient intérêt à se préparer pour un parcours mouvementé. Bien qu’on les considère souvent comme des placements à revenu fixe, les actions privilégiées sont soumises au risque du marché boursier. Dernièrement, le quatrième trimestre de 2018 nous l’a rappelé brutalement, lorsque l’indice de rendement global des actions privilégiées S&P/TSX a perdu 10 %.
« Tout a commencé par des liquidations sur les marchés boursiers mondiaux, dit Nicolas Normandeau, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Fiera Capital, de Montréal, et gestionnaire principal du Horizons Active Preferred Share ETF (1,6 G$). Il y a eu une véritable réévaluation du risque. »
L’élargissement des écarts de taux dans les marchés obligataires, la décision des acheteurs nerveux de rester en retrait, et la vente à perte à des fins fiscales dirigée par les conseillers dans le marché de détail ont également contribué à la liquidation des actions privilégiées du quatrième trimestre, ajoute-t-il.
« Les évaluations sont bien meilleures qu’en octobre. Mais nous pensons qu’en 2019, cela restera volatil », dit Nicolas Normandeau. Supposant que les marchés boursiers seront relativement stables et qu’il n’y aura pas de récession économique cette année, l’équipe de Fiera estime que le FNB Horizons sera en mesure de gagner, à peu près, le taux du coupon, qui est actuellement d’environ 5 %.
Le prix des actions privilégiées est devenu attrayant par rapport à celui des autres catégories d’actifs, dit Ryan Domsy, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Foyston Gordon & Payne (FGP), de Toronto. « En particulier, nous voyons actuellement une grande valeur quant aux obligations. » FGP gère le FNB Evolve Active Canadian Preferred Share ETF, de 232 M$, lancé en septembre 2017.
Selon Ryan Domsy, la valeur découle des rendements des dividendes sur les actions privilégiées, qui sont beaucoup plus élevés que les dividendes des actions ordinaires ou que les versements d’intérêts sur les obligations. Les rendements des actions privilégiées sont en moyenne bien plus du double du rendement de 1,91 % des obligations du gouvernement du Canada à cinq ans.
Les fonds d’actions privilégiées conviennent bien aux comptes non enregistrés en raison des crédits d’impôt pour dividendes. Toutefois, il peut aussi être judicieux pour les clients ayant de plus petits comptes, qui investissent seulement dans les régimes enregistrés, d’avoir quelque exposition aux actions privilégiées, dit Christopher Doll, vice-président, ventes et stratégie FNB, chez Invesco Canada, de Toronto.
Christopher Doll cite la volatilité relativement faible et les basses corrélations avec les autres actifs comme caractéristiques positives des actions privilégiées pour les investisseurs particuliers. En détenant des actions privilégiées dans un régime enregistré, dit-il, « vous renoncez à quelques avantages sur le plan fiscal, mais vous obtenez encore un rendement élevé. Vous obtenez encore les avantages de la diversification. »
Le fait qu’à peu près 80 % de l’univers des actions privilégiées est constitué d’émissions à taux révisé peut expliquer la corrélation négative avec les obligations. À la différence des prix des obligations, qui vont dans le sens opposé des taux d’intérêt, une hausse des taux est de bon augure pour les actions privilégiées à taux révisé.
En général, les taux de ces actions privilégiées sont révisés tous les cinq ans et sont basés sur un pourcentage fixé au-dessus du rendement de l’obligation du gouvernement du Canada à cinq ans. Du fait que le rendement de l’obligation à cinq ans est beaucoup plus élevé qu’il y a cinq ans, les émissions à taux révisé sont révisées à des taux considérablement plus élevés.
Même parmi les actions privilégiées à taux révisé, il existe un éventail de dispositions de versement de dividendes.
« C’est un marché complexe, dit Nicolas Normandeau. Certains taux ont des révisions à la baisse, d’autres en ont de moyennes et d’autres ont des révisions à la hausse. » Toutes, ajoute-t-il, représentent « un pari totalement différent quant aux fluctuations de taux d’intérêt et aussi quant aux mouvements de crédit. »
Avec une capitalisation boursière totale d’environ 70 G$ à 75 G$, l’univers canadien des actions privilégiées constitue un petit créneau des marchés des capitaux canadiens. Selon le dernier décompte, seulement 14 FNB investissent exclusivement ou principalement dans les actions privilégiées canadiennes, ce qui représente des actifs combinés d’un peu plus de 7 G$.
L’essentiel des actifs est détenu par les trois plus importants de la catégorie des FNB. Le premier est le BMO Laddered Preferred Share Index ETF, de 1,8 G$, qui investit dans un portefeuille d’actions privilégiées à taux révisé diversifié par dates d’échéance.
Le suivant sur le plan de la taille est le Horizons Active Preferred Share ETF, de 1,6 G$, la plus importante offre à gestion active. Le troisième en importance, et le plus largement représentatif de cette catégorie d’actifs, est le iShares S&P/TSX Canadian Preferred Share Index ETF, de 1,4 G$, qui compte environ 240 titres.
Lancé en avril 2007, le fonds iShares est le plus ancien FNB de cette catégorie ; ses antécédents sont révélateurs des hauts et des bas de cette catégorie d’actifs. Ce FNB a perdu de l’argent dans deux des cinq dernières années civiles : un recul de 8,4 % en 2018, et même pire, une chute de 15,3 % en 2015.
Variation sur le thème de l’indice, le FNB Invesco Canadian Preferred Share Index ETF, de 179 M$, suit l’indice NASDAQ Select Canadian Preferred Share Index. Des six FNB qui investissent principalement dans les actions privilégiées canadiennes et ont un historique d’au moins trois ans, l’offre d’Invesco est la seule à avoir une notation de Morningstar au-dessus de la moyenne pour des rendements historiques ajustés au risque.
« C’est une combinaison des 100 actions privilégiées versant des dividendes et ayant le rendement le plus élevé et la plus faible volatilité du marché, dit Christopher Doll. Et c’est ce que nous appelons un “facteur” ou un penchant de “bêta intelligent” de cette catégorie d’actifs. »