De plus en plus d’investisseurs canadiens laissent parler leur conscience dans leurs placements et découvrent que leurs convictions peuvent aussi livrer des rendements respectables.
Mais si les options d’investissement socialement responsable (ISR) ou d’investissement en fonction de critères environnementaux, sociaux ou de gouvernance (ESG) se multiplient, il en va de même pour les difficultés à dénicher le bon investissement, celui qui offre également une croissance permettant d’atteindre ses objectifs financiers personnels.
« Pour un investisseur, c’est une époque merveilleuse pour contribuer au changement qu’on aimerait voir dans le monde avec son argent », a observé Rajan Bansi, directeur général de RBC Investi-Clic, le service de gestion de placements en ligne de la Banque Royale.
Selon Rajan Bansi, les portefeuilles ESG d’Investi-Clic ont offert une performance supérieure d’environ 100 points de base à celle de ses portefeuilles standard au cours des deux dernières années, et devraient faire tout aussi bien sur un cycle de marché de cinq à sept ans.
« Quand vous regardez l’investissement ESG, maintenant plus que jamais, il est important pour les Canadiens que leurs investissements reflètent leurs valeurs personnelles », a reconnu Joe Reid, vice-président de la gestion de patrimoine et de l’investissement d’impact pour la Vancouver City Savings Credit Union (Vancity).
Le fonds d’actions mondiales ISR de Vancity a surclassé l’indice mondial MSCI, une mesure du rendement des actions mondiales, de plus de 20 % l’an dernier, a souligné Joe Reid. En outre, son fonds d’actions canadiennes ISR a surpassé l’indice composé de la Bourse de Toronto de plus de 10 %.
Un type de fonds en croissance
La valeur totale des actifs sous gestion dans les fonds d’investissement responsable canadiens a bondi à 3200 milliards $ en 2019, un gain de 48 % sur deux ans, selon un rapport sur les tendances de l’Association pour l’investissement responsable, publié en novembre.
Le rapport a révélé que ces fonds représentaient environ 62 % de l’industrie canadienne de l’investissement, contre 51 % deux ans plus tôt. Il a dénombré pas moins de sept catégories ou types de fonds différents dans son enquête.
Willis Langford, de Langford Financial, un conseiller en revenu de retraite à Calgary, entend bien parler de l’engouement pour les fonds ESG, mais plusieurs clients n’ont pas encore demandé de passer à l’investissement responsable.
Lorsqu’ils le feront, il a l’intention de s’appuyer sur des agences de notation indépendantes tierces pour déterminer quels fonds ont les meilleurs dossiers ESG ou ISR et rapportent de l’argent.
« On investit pour faire de l’argent de manière responsable, mais il faut que les deux éléments soient là », a-t-il insisté.
Chez RBC Investi-Clic, le fonds ESG est composé d’investissements dans des entreprises en fonction de leur score dans 37 secteurs de risque, a expliqué Rajan Bansi.
Le fonds n’investira pas dans les entreprises impliquées dans les armes à feu civiles, les armes conventionnelles, le tabac ou les « graves controverses », mais il évaluera le reste et investira plus lourdement dans ceux qui obtiennent les scores les plus élevés.
« Je considère l’ESG comme une approche de gestion des risques », a-t-il affirmé, soulignant que les « mauvais acteurs » ont tendance à avoir des coûts commerciaux plus élevés que les entreprises responsables, et qu’ils sont ainsi sous-représentés dans le fonds ESG.
La banque envisage d’élargir ses offres pour donner aux clients plus de choix en termes de nuances d’investissement responsable, a-t-il ajouté.
Certaines industries rayées
Vancity, qui s’est récemment fixé comme objectif d’atteindre des émissions de carbone nettes nulles de l’ensemble de son portefeuille de prêts d’ici 2040, a rayé six industries interdites de ses investissements ISR: les combustibles fossiles, la pornographie, les paris, les armes militaires, l’énergie nucléaire et le tabac.
Elle s’implique également auprès des entreprises qu’elle soutient en les exhortant à apporter les changements nécessaires, a déclaré Joe Reid, ajoutant que les investisseurs devaient se méfier de l’« écoblanchiment », qui survient lorsque les entreprises tentent de déguiser ou de cacher leurs mauvaises habitudes sous des mesures ou des allégations sans grand impact.
Rajan Bansi et Joe Reid ont tous deux déclaré qu’il était important de consulter des conseillers financiers et des experts fiscaux lors de modifications importantes d’un portefeuille de placements existant.
Il y a moins d’implications fiscales lors du transfert de placements dans un fonds enregistré comme un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou un compte d’épargne libre d’impôt (CELI), mais la vente d’un placement non enregistré peut entraîner des gains et des pertes en capital qui peuvent avoir une incidence sur la facture fiscale et doit être faite avec prudence, peut-être même sur plusieurs années, ont-ils fait valoir.
Dans le passé, a indiqué Joe Reid, l’investissement responsable était considéré comme un moyen coûteux et risqué de gérer son avenir financier, sujet à de faibles rendements.
« En réalité, investir de manière responsable ne signifie plus cela. De nos jours, investir de manière responsable est simplement une bonne affaire. »