André Cyr, président de Fisc-Cap Services Conseils, à Laval, est parti de ce cas fictif pour réaliser différents scénarios répartis sur une période de 19 ans, soit jusqu’à ce que le client atteigne l’âge de 90 ans.
Si le client opte pour un FERR, il doit, chaque année, retirer une somme minimale, prescrite par le ministère des Finances du Canada. «Je lui propose un retrait de 3 690 $ par mois pendant 15 ans. À l’âge de 86 ans, ses retraits tombent à 588 $ par mois, pour un total de 699 480 $, selon les taux d’intérêt d’aujourd’hui, soit 2 %.»
Dans le cas d’une rente certaine de 19 ans, la somme maximale versée est alors de 3 490 $ par mois, pour un total de 795 720 $ après 19 ans. L’inconvénient, c’est qu’après 90 ans, le client n’a plus rien.
En revanche, s’il décide d’acheter une rente viagère assortie d’une garantie de versement de 19 ans, il recevra 3 265 $ par mois, pour un total de 744 420 $ à 90 ans. Le paiement de la rente est ainsi garanti au rentier pour le terme choisi ou à son bénéficiaire en cas de décès du rentier.
André Cyr s’est fondé sur les revenus mensuels offerts par huit compagnies différentes, en date du 4 mars 2013. Avec un capital de départ de 600 000 $, le revenu mensuel varie de 2 982 $ à 3 265 $, selon les compagnies.
«La différence de 51 300 $ (795 720 $-744 420 $) avant impôt joue en faveur de la rente certaine sur la rente viagère. En revanche, si le rentier survit à ses 90 ans, avec la rente viagère il lui faudra moins de 16 mois pour récupérer cet écart (51 300 $/3 265 $ x mois = 15,7 mois). Et il continuera à recevoir les versements jusqu’à son décès», analyse André Cyr.
Étant donné qu’il s’agit ici d’un couple, tous deux pourraient souscrire une rente viagère réversible assortie d’une garantie de 19 ans. En cas de décès d’un des deux époux, l’autre continue à recevoir les revenus de la rente.
Lorsqu’on réalise une planification pour un couple, l’espérance de vie envisagée est plus longue. L’un des deux vivra peut-être jusqu’à 94 ou 95 ans, par exemple. D’ailleurs, d’après le tableau de l’«espérance de vie selon divers risques de survie» de l’Institut québécois de planification financière1, les deux époux ont 50 % de chances d’atteindre l’âge de 93 ans.
«En prenant les taux d’aujourd’hui, avec une rente viagère, le couple bénéficierait de 3 225 $ par mois pendant un minimum de 19 ans, pour une somme totale de 735 300 $. Nous ne sommes pas loin du montant de 744 420 $, qui ne concernait que le mari. Dans ce cas précis, j’opterais donc pour la rente réversible», assure André Cyr.
Une opinion partagée par Georges-Michel Raymond, conseiller en sécurité financière, Permavie, à Laval.
«En général, lorsque mes clients optent pour une rente viagère, nous souscrivons la garantie de 15 ans et la réversibilité dans le cas d’un couple. Si le client décède avant 15 ans, le capital intégral sera remboursé à l’autre membre du couple. Et s’il vit longtemps, il sera gagnant», décrit le conseiller.
Diversifier les revenus
Georges-Michel Raymond présente systématiquement la rente viagère et le FERR à ses clients. Après un certain nombre d’années, le FERR risque d’être réduit à néant, tandis qu’une rente viagère, même avec des taux d’intérêt très bas, continuera à verser des revenus jusqu’à la fin de la vie du client.
«Je recommanderais de diviser le capital pour le placer dans différents produits. Par exemple, avec un capital de 600 000 $, le client pourrait placer 200 000 $ dans une rente viagère qui lui procurera un revenu sa vie durant», recommande Georges-Michel Raymond.
Jean-François Carrier, planificateur financier, SFL Partenaire de Desjardins Sécurité Financière, à Rivière-du-Loup, est plus nuancé par rapport à l’utilisation de la rente viagère. Parmi les cas qu’il rencontre, certains clients âgés de 71 ans sont encore au début du processus de décaissement. Ils se trouvent parfois trop jeunes pour envisager une rente viagère et cherchent encore la flexibilité.
Certains clients refusent même catégoriquement de souscrire une rente. «J’ai eu une cliente, peu tolérante au risque, pour qui la rente viagère était la solution la plus avantageuse du point de vue des revenus après impôts. Malgré cela, elle n’a pas souscrit la rente viagère, car elle n’aimait pas l’idée de perdre son argent si elle décédait le lendemain. Elle voulait aussi avoir de la flexibilité», témoigne Sylvain Laguë, planificateur financier, SF Podium, à Brossard.
«Si le client ne souhaite pas tout de suite une rente viagère, nous pouvons lui proposer de transférer son REER dans un FERR que nous complétons avec une rente certaine dans un premier temps. À la fin de la rente certaine, par exemple à 80 ans, le client peut alors convertir son FERR en rente viagère», explique Jean-François Carrier.
Plus le client retarde la souscription d’une rente viagère, plus c’est intéressant pour lui.
Le planificateur financier évalue aussi l’impact fiscal de ces transferts. Si le client dispose d’un capital important avec des avoirs enregistrés et des avoirs non enregistrés, il sera plus avantageux de convertir les avoirs non enregistrés en rentes et de transférer alors le REER dans un FERR.
Dans le FERR, Jean-François Carrier privilégiera les fonds de revenus pour obtenir une efficience fiscale, des contrats de placement garanti (CPG), des fonds sans frais à l’entrée ou au maximum avec des frais réduits sur une période de trois ans.
«L’idée de cette stratégie, c’est d’ajouter de la flexibilité au portefeuille, de pouvoir vendre des fonds pour aller chercher de l’argent sans que le client n’ait de frais», dit-il.
En effet, le FERR doit être liquide pour que le client puisse effectuer des retraits en partie ou en totalité à tout moment. Le conseiller doit protéger le capital du FERR au maximum.