Et pourtant, près de 25 ans après que les FNB ont fait leur entrée sur la scène du placement canadien, ils ne constituent qu’une part microscopique des actifs que détient la clientèle des courtiers. Ce n’est que cette année que la première société de courtage de fonds communs, Mandeville Wealth Services, a commencé à vendre des FNB.
Bien que Mandeville Wealth, société de Burlington (Ontario), soit à créditer pour son avancée, moins de cinq vendeurs de la firme ont effectué des transactions de FNB pour leurs clients, sur un total d’environ 80 000 conseillers sous la supervision de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM), l’organisme national d’autoréglementation.
Mais c’est tout de même un début. « Au nom de tous les fournisseurs de FNB, c’est un développement que nous saluons », dit Howard Atkinson, président de l’Association canadienne des FNB (ACFNB) et de Gestion FNB Horizons.
Ce ne sont pas tous les FNB qui peuvent être offerts par des courtiers de fonds. Ceux qui ont recours à l’effet de levier ou à l’effet de levier inverse ne sont généralement pas admissibles. La société de FNB affectée le plus par cette exclusion est Horizons, bien que Howard Atkinson n’ait pas d’objection.
Howard Atkinson fait remarquer que ces FNB spécialisés sont conçus pour les spéculateurs actifs, et pas les investisseurs à plus long terme qui représentent la clientèle de base des courtiers de fonds communs. L’immense majorité des actifs de FNB au Canada (y compris ceux très divers de Horizons) peuvent être distribués par des courtiers en fonds communs.
Les obstacles qui entravent la vente des FNB ont principalement à voir avec les courtiers eux-mêmes, pas les autorités de réglementation. Il faudrait que la plupart des courtiers mettent à jour leurs systèmes administratifs ou trouvent d’autres traitements de leurs commandes de FNB. Il faudrait qu’ils mettent en oeuvre et fassent appliquer les conditions de conformité et de compétence requises. Avant même de décider de mettre à jour ces capacités, il faudrait aussi qu’ils déterminent que c’est dans leur intérêt commercial, ainsi que dans ceux de leurs clients, d’étendre leur champ d’action aux FNB.
D’un autre côté, une concurrence accrue pousse ces courtiers à vendre des FNB, ces derniers ayant atteint 70 milliards de dollars (G$) d’actifs avec environ 300 fonds cotés à la Bourse de Toronto. Leur exclusion des catalogues de produits offerts par les courtiers s’est traduite par une plus grande disparité dans les choix de produits offerts par les réseaux de distribution de l’industrie des fonds communs.
Les investisseurs qui veulent acheter des FNB, ou pour qui les FNB seraient une alternative ou un complément viable aux fonds communs traditionnels, sont divisés en deux camps. D’un côté, les clients des sociétés de courtage ou des conseillers en placements qui ont, directement ou indirectement, accès à la bourse peuvent se procurer des FNB.
De l’autre côté, à l’exception de certains clients de Mandeville, ceux qui investissent par le truchement des courtiers en fonds communs n’ont pas accès à des produits tels que des FNB indiciels à bas prix ou des FNB qui utilisent des approches actives comme le bêta stratégique ou ont une gestion totalement active.
Y aura-t-il bientôt d’autres courtiers de fonds comme Mandeville, et à beaucoup plus grande échelle, qui décideront d’offrir des FNB? « Il est vraiment difficile pour nous d’en juger », dit Karen McGuinness, vice-présidente principale de l’ACCFM responsable de la réglementation des membres et de la conformité.
Karen McGuinness dit que l’ACCFM a été saisie de demandes sur l’accès aux FNB depuis sa création en 2001. Il y a eu un accroissement de ces demandes depuis l’annonce de Mandeville à la fin du mois d’avril, bien que, comme ajoute Karen McGuinness, cela ne veuille pas dire que les courtiers vont passer à l’action.
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Néanmoins, nous assistons ces jours-ci à beaucoup plus que des bavardages informels initiaux. En juillet, l’ACCFM a affiché un document de quatre pages à la section de son site Web réservée aux membres, au sujet de la vente des FNB.
La fiche d’information de l’ACCFM explique la position de cet organisme sur des questions comme l’amélioration des systèmes administratifs, l’exécution des transactions, les dispositions de garde, les contrôles internes, la nécessité de bien connaître les produits, la compétence des conseillers et les exigences de fonds propres.
Avec les fonds communs traditionnels à capital variable, l’exécution des ordres est simple. Il y a un seul moment de fixation des prix par jour, à la fin de la journée ouvrable, et du moment que le courtier passe son ordre à temps, il sera honoré. Avec les FNB, les transactions ont lieu toute la journée et les prix fluctuent, et l’on n’est pas certain qu’un ordre sera honoré, en totalité ou en partie. Ceux qui offrent des FNB à leurs clients doivent aussi se familiariser avec les écarts de l’offre et de la demande, la différence entre ordres à cours limite et ordres de Bourse, et ainsi de suite.
Mandeville Wealth a surmonté les obstacles administratifs à l’aide d’un système dont l’entretien est assuré par Broadridge Financial Solutions, et grâce à un arrangement avec l’agence de compensation Fidelity Clearing Canada.
Comme l’explique Paul Strijckers, vice-président des initiatives stratégiques à Broadridge, la plupart des courtiers de fonds communs ne disposent pas des systèmes nécessaires pour traiter les transactions de FNB. Leurs services de transactions et de tenue de registres sont assurés par le prestataire de services FundSERV et par les sociétés de fonds communs dont ils vendent les produits. La plateforme Dataphile de Broadridge, en revanche, peut traiter les transactions boursières comme celles de fonds communs.
Une autre condition requise pour les courtiers de fonds mutuels offrant des FNB est d’avoir une entente de travail avec une société de courtage sous l’autorité de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM).
Dans le cas de Mandeville Wealth, cela a été accompli par sa filiale Mandeville Private Client, firme sous l’autorité de l’OCRCVM, qui elle-même s’en remet à une autre société membre de l’OCRCVM, Fidelity Clearing Canada, pour assurer l’exécution des transactions et les services de règlement, de garde et de soutien. Les entités Mandeville font partie d’un groupe de sociétés de services financiers contrôlées par Michael Lee-Chin.
Mandeville a aussi résolu les questions de conformité et de compétence soulevées par l’ACCFM. Elle a dressé une liste des FNB approuvés et donné pour instruction à Broadridge de programmer le système de commande de façon à bloquer tout fonds qui ne soit pas sur la liste approuvée.
Les conseillers de Mandeville qui ont le droit de vendre des FNB ont suivi intégralement le cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada. Le CCVM représente le niveau d’éducation requis par l’ACCFM pour les conseillers qui choisissent de vendre des FNB.
Les autorités de l’ACCFM ont eu des entretiens avec trois prestataires de services d’éducation pour discuter des autres matériels éducatifs qui pourraient être mis au point. Au nombre de ceux qui s’intéressent le plus vivement à promouvoir l’éducation sur les FNB auprès des professionnels du placement, y compris les courtiers de fonds, on trouve l’ACFNB, qui représente presque tous les gestionnaires de FNB au pays.
L’ACFNB a recruté le Smarten Up Institute pour mettre au point deux cours en ligne sur les FNB à l’usage des professionnels de l’industrie, le premier étant un cours d’introduction et l’autre un cours avancé. Ces cours ont tous deux été lancés en mars, bien qu’ils n’aient pas reçu l’aval de l’ACCFM.
Dans les coulisses, l’ACFNB est en train de travailler à l’élaboration d’un processus qui permettra à d’autres firmes de l’ACCFM de vendre des FNB si elles en décidaient ainsi. Comme l’ont déjà montré Mandeville et ses prestataires de services, l’initiative pilotée par l’ACFNB sera conçue pour se débarrasser des diverses difficultés d’administration et d’exécution des ordres que les sociétés de l’ACCFM doivent surmonter en premier lieu.
Pour les sociétés qui ont à la fois des filiales membres de l’OCRCVM et de l’ACCFM, une solution administrative potentielle consisterait à permettre que la filiale membre de l’ACCFM utilise la plateforme de transactions de la filiale membre de l’OCRCVM.
Il reste à voir à quel degré les courtiers de fonds communs voudront étoffer leur catalogue. Les sociétés de courtage comme les firmes bancaires et le groupe Investors, qui distribuent principalement ou totalement leurs propres fonds, ont moins de chances d’adhérer au principe de distribution de FNB que les courtiers indépendants.
La rémunération des conseillers est une autre question essentielle. À la différence des promoteurs de fonds communs classiques qui ont pour habitude de payer des commissions de suivi aux courtiers et négociants qui vendent leurs produits, la plupart des FNB ne paient pas pour les services de distribution. Ajouter les FNB à leur catalogue convient beaucoup mieux aux conseillers rémunérés sur honoraires, par opposition à la majorité, qui demeurent rémunérés à la commission.