Des fonds de titres à revenu fixe dotés d’une forte exposition aux liquidités et aux obligations gouvernementales, un fonds d’actions axé sur la transformation numérique et un fonds à faible volume couvert pour les risques extrêmes figurent au nombre des fonds spéculatifs qui se sont illustrés lors de la première vague de la pandémie en 2020.
Les gestionnaires de ces fonds spéculatifs ont évoqué leurs stratégies lors du Canadian Hedge Fund Awards Winners Showcase 2021, une conférence virtuelle organisée par Alternative IQ.
Ils ont expliqué comment leurs fonds ont pu prospérer malgré le choc de la pandémie et de quelle manière ils s’efforceront de générer de l’alpha dans l’actuel contexte d’incertitude permanente et de taux historiquement bas.
Paul Sandhu, président et directeur général de Marret Asset Management, a présenté le fonds obligataire diversifié de sa société, récompensé pour avoir rapporté le meilleur rendement sur un an dans la catégorie crédit. (Tous les fonds gagnants, annoncés à l’automne 2020, sont répertoriés en ligne et ont été jugés sur la base des performances obtenues à la fin juin 2020).
En raison des écarts de rendement qui étaient particulièrement limités à l’époque, le fonds n’avait pratiquement aucune exposition au crédit à l’approche de la pandémie.
« Le fond était presque totalement exposé aux obligations gouvernementales au début de 2020 », a expliqué Paul Sandhu. Puis, lorsque les banques centrales ont baissé les taux d’intérêt en réponse à la pandémie, le fonds a pu améliorer « la duration de son exposition pendant cette période », a-t-il ajouté.
Une grande partie du fonds est constituée de transactions basées sur de fortes convictions (high-conviction trades) provenant d’autres fonds spéculatifs de la firme, a précisé Paul Sandhu. Les expositions peuvent également inclure des actions, des matières premières, des devises et des titres liés à l’inflation.
Sans contrainte de classe d’actifs, le fonds peut rechercher les meilleurs rendements ajustés au risque dans les titres à revenu fixe, en fonction des cycles économiques, des taux d’intérêt et du crédit, a précisé Paul Sandhu.
Interrogé sur le resserrement des ventes à découvert alimenté par les sous-revendeurs, observé cette année, il a déclaré que cela avait effectivement influencé certains choix, mais de façon modeste, étant donné que les titres à revenu fixe sont négociés de gré à gré et qu’ils sont ainsi moins exposés que le sont les actions.
« Nous sommes plus conscients de nos positions courtes », en ce qui concerne des éléments tels que la taille et la liquidité, a-t-il souligné.
Sandy Liang, gestionnaire de portefeuille chez Purpose Investments, gère un fonds d’opportunités de crédit qui a remporté la première place pour le meilleur rendement sur trois ans et la deuxième place pour le meilleur ratio de Sharpe sur trois ans, dans la catégorie crédit. Le fonds utilise une approche ascendante qui intègre de 50 à 70 titres.
Le fonds dispose généralement d’une liquidité élevée pour mettre en œuvre des idées d’investissement, ce qui s’est avéré positif à l’approche de la pandémie. « Vous voulez acheter alors que tout le monde vend », a expliqué Sandy Liang. Le fonds a ainsi profité de la dislocation du marché l’année dernière pour prêter à des sociétés de placement immobilier.
Sandy Liang a fait remarquer que les sociétés d’acquisition à vocation spécifique (SAVS) apporteront « des vents favorables » à de hauts rendements en 2021, car elles ont acquis des sociétés privées au moment où les politiques monétaires étaient accommodantes. « Si vous êtes un prêteur sur ce marché, vous allez en bénéficier [des acquisitions des SAVS] parce qu’on y retrouve beaucoup de capitaux propres », a-t-il déclaré.
Puisque le fonds mise largement sur le retour de rendements élevés, l’un des moyens de se prémunir contre une éventuelle hausse des taux d’intérêt tient dans la vente à découvert. « Nous pensons qu’il y a une opportunité asymétrique à disposer ainsi de titres de dettes d’entreprises de qualité », a affirmé Sandy Liang.
Noah Blackstein, vice-président et gestionnaire de portefeuille senior chez Dynamic Funds, a parlé du fonds d’opportunités de croissance mondiale de sa société (ce fonds a été salué pour avoir obtenu les meilleurs rendements sur trois et cinq ans dans la catégorie des actions).
Le fonds, qui adopte une approche ascendante, a notamment bénéficié l’année dernière de l’accent qu’il met sur la croissance à long terme dans des secteurs tels que la transformation numérique.
Noah Blackstein a fait remarquer que la technologie s’est transformée au cours des deux dernières décennies, passant des produits aux plates-formes. Il a aussi mentionné que les industries qui en sont aux premiers stades de cette révolution offriront des opportunités d’investissement à l’avenir. Les banques qui n’utilisent qu’Internet sur les marchés émergents en sont un exemple, a-t-il illustré.
Pour évaluer les joueurs du secteur, Noah Blackstein a expliqué qu’il analysait les bénéfices des trois à cinq prochaines années. « Si les perspectives futures ne nous permettent pas d’espérer dépasser le prix de l’action, alors nous allons passer à autre chose », a-t-il déclaré.
La faiblesse des taux d’intérêt pose toutefois un défi pour faire une évaluation basée sur les flux de trésorerie actualisés, a noté James Cole, vice-président senior et gestionnaire de portefeuille chez Portland Investment Counsel. Cela peut représenter un défi particulier pour ce gestionnaire, étant donné que son fonds d’actions ciblé se concentre sur un petit nombre de titres avec une forte pondération en pourcentage – jusqu’à 40 %.
Lorsque les taux sont bas, il utilise un plancher de 8 % – le rendement à long terme des actions – comme taux d’actualisation pour les comparaisons entre les entreprises.
Alors que le fonds utilise l’effet de levier pour capitaliser sur la volatilité, James Cole a déclaré que son approche avait été utilisée de manière mesurée en 2020. « Il y a eu de réels dommages économiques, et je voulais … être sûr que nous irions jusqu’au bout. » Le fonds ne détenait pas de titres qui ont été affectés par la pandémie tels que des titres dans les secteurs du voyage et l’hébergement, et de l’énergie.
Avec des taux historiquement bas, James Cole a déclaré qu’il s’attendait à ce que les actions soient « la classe d’actifs la plus performante pour une période de temps encore considérable ». Lorsque les taux commenceront à augmenter, et que cela provoquera des perturbations, le fonds saisira les opportunités, a-t-il précisé. Il s’est classé troisième pour le rendement sur cinq ans dans la catégorie des actions.
Jim McGovern, président-directeur général d’Arrow Capital Management, a déclaré que son équipe vise à fournir un alpha, une faible corrélation aux actions et aux obligations, et une faible volatilité à son fonds macro alternatif (il a remporté la troisième place pour le rendement sur cinq ans dans la catégorie macro mondiale). Le fonds gère notamment le risque grâce à des couvertures de risques pour les événements imprévus.
Le processus d’investissement du fonds repose en partie sur des prévisions économiques à court terme, ce qui permet au fonds de tirer parti des changements marginaux du PIB et de l’inflation (qui affectent respectivement les bénéfices et les taux d’actualisation pour l’analyse des flux de trésorerie actualisés).
Il s’attend à un environnement désinflationniste au troisième trimestre, ce qui nécessite une position plus défensive. « Nous commencerons à nous positionner pour cela probablement en avril ou mai de cette année », a déclaré Jim McGovern.
Indépendamment de l’évolution du marché, Sandy Liang a déclaré que l’avantage réside en fin de compte dans « le sens de l’investissement et le fait de faire le travail », de sorte que les thèses risque/récompense sont bien fondées.