En 2018, les équipementiers et les fournisseurs de services pétroliers ont perdu 22% tandis que les assureurs-vie ont cédé 16%. Seuls les chemins de fer canadiens ont gagné 8%.
Depuis 2012, le stratège quantitatif propose trois thèmes qu’il greffe à sa stratégie de base qui consiste à se déplacer tactiquement d’un secteur à l’autre à court terme en fonction d’indicateurs quantitatifs, pour mettre en valeur son approche.
Ces placements à contre-poil se destinent aux clients institutionnels qui veulent ajouter des placements en périphérie de leur portefeuille principal.
Ce genre de suggestions convient donc aux investisseurs qui ont déjà un portefeuille bien diversifié et des nerfs d’acier, car elles sont dans des secteurs boudés ou incompris.
« À chaque année, nous estimons que les chances sont bonnes pour que les industries choisies procurent un rendement positif et supérieur à celui du marché, tout en offrant globalement un bon rapport risque-rendement. »
Depuis sept ans, ses thèmes ont procuré un rendement moyen de 15%.
Le contexte
Dans l’hypothèse que le marché nord-américain vient de connaître son premier marché baissier depuis 2011 sans récession, M. Roberge a fait ses choix parmi les secteurs qui performent bien après de tels épisodes.
Les secteurs sélectionnés sont aussi bon marché tant en absolu et que par rapport au marché, après une période de mauvaise performance, ce qui procure une certaine marge de sécurité.
Enfin, l’industrie elle-même doit offrir un point de bascule fondamental.
Les trois thèmes
1- Les titres américains de biotechnologie
Après trois ans de performance inférieure au S&P 500, le secteur de la biotechnologie présente un meilleur rapport risque-rendement qu’avant.
Les neuf hausses de taux de la Fed depuis la fin de 2015 et l’accélération des bénéfices du S&P 500 avaient tout simplement fait de l’ombre au secteur de la biotechnologie, pendant ces trois ans.
En d’autres mots, l’intérêt des investisseurs était ailleurs.
La biotechnologie performe aussi le mieux parmi tous les secteurs de l’industrie de la santé à la fin d’un cycle économique, soit lorsque la Fed achève ses tours de vis et que la croissance des bénéfices du S&P 500 ralentit.
«Les vents de front qui subsistent depuis 2016 deviennent des vents de dos», évoque M. Roberge.
Fondamentalement, ces sociétés devraient améliorer leurs marges parce que la hausse des prix de vente (+ 2%) dépasse celle des salaires moyens (+ 1,1%), un repère important pour une industrie aussi dépensière en R&D, précise aussi le stratège.
En plus, il est probable que les sociétés de biotechnologie instaurent leur propre plan de coupes, suivant ainsi l’exemple de la diète majeure que s’imposent les grandes sociétés pharmaceutiques.
Les analystes augmentent aussi à nouveau leurs prévisions de revenus pour ce secteur, un facteur qui avait mis fin au déclin de ces titres en 2008 et en 2011.
De plus, le secteur se négocie à un multiple de 12 fois les bénéfices prévus dans 12 mois, soit une évaluation de 20% inférieure à celle du S&P 500.
L’achat colossal de Celgene (CELG, 87,13$US) par Bristol-Myers Squibb (BMY,47,73$US) pour 74 milliards de dollars américains pourrait inciter d’autres acteurs à emboiter le pas afin de ne pas se laisser distancer.
«C’est envisageable puisque les flux de trésorerie libres des grandes pharmaceutiques s’améliorent», ajoute-t-il.
M. Roberge suggère le fonds négocié en Bourse iShares Nasdaq Biotechnology (IBB, 108,32$US) et énumère aussi les titans de l’industrie AbbVie (ABBV, 87,95$US), Amgen (AMGN, 199,47$US), Gilead Sciences (GILD, 68$US), Biogen (BIIB, 330,47$US) et Celgene.
2- Constructeurs américains de maisons
Il est clair que de miser sur la consommation discrétionnaire aussi tardivement dans le cycle économique est anticonformiste, reconnaît le financier.
Or justement, les constructeurs ont déjà chuté de 33% en 2018 parce que les prix résidentiels élevés et la hausse des taux hypothécaires ont réduit l’abordabilité.
Depuis l’été par contre, les taux hypothécaires ont baissé et même retrouvé le niveau qu’ils avaient en 2017, aux États-Unis.
«Les taux obligataires et hypothécaires ne regagneront pas en 2019 les sommets connus en 2018», croit aussi M. Roberge.
En même temps, le nombre de maisons bâties et invendues augmente, ce qui modère déjà les prix de vente. Les inventaires restent aussi nettement sous la moyenne.
Des taux et des prix plus modérés qu’en 2018 devraient attirer de nouveau les acheteurs et raviver les affaires des constructeurs.
M. Roberge émet aussi l’hypothèse que les permis de construire, les mises en chantier et les ventes de maisons existantes atteindront un plancher à mi-année, avant une reprise. Les prix des maisons devraient suivre ensuite le mouvement.
Si la hausse de 8% des salaires dans la construction reste un problème pour les marges des entrepreneurs, la chute de 20% du prix du bois compense.
Enfin, les titres des constructeurs se négocient à prix d’aubaine.
Leur évaluation est 53% moins élevée que celle du S&P 500 en fonction des bénéfices, de 65% moins chère en fonction des revenus et de 46% inférieure en fonction de la valeur comptable.
M. Roberge suggère le fonds négocié en Bourse iShares US Home Construction (ITB, 33,38$US) et mentionne les trois plus grands constructeurs du S&P 500 D.R. Horton (DHI, 39,74$US), Lennar (LEN, 46,67$US) et Pulte Group (PHM, 28,62$US).
3- Producteurs de métaux de base
Comme c’est le cas pour la biotechnologie et les constructeurs, les producteurs de métaux de base performent généralement bien en Bourse à la fin d’un cycle économique.
Avec un recul de 12%, ce ne fût certainement pas le cas en 2018, mais M. Roberge y croit encore.
Fondamentalement, une Fed plus flexible, une pause dans la guerre commerciale sino-américaine et l’injection de liquidités par la Chine dans son système financier écartent les pires risques macro-économiques, fait valoir M. Roberge.
La demande pour le cuivre est aussi plus solide qu’il n’y paraît. International Copper Study Group rapporte une hausse de 6% de l’usage du cuivre affiné.
Les données de transport par train ou par bateau de matières en vrac et d’emballages suggèrent aussi que les tarifs ne nuisent pas à la demande de métaux, explique le financier.
En même temps, la production mondiale de cuivre diminue si l’on se fie à différents repères mondiaux et régionaux ainsi qu’aux dépenses des producteurs.
Les stocks de cuivre indiquent aussi que le marché métal rouge n’a pas de surplus.
Malgré ce portrait favorable, les cours du cuivre et des producteurs de métaux de base ont reculé en 2018 si bien que l’évaluation des titres est aussi modeste que lors de récessions ou de la chute pétrolière et du ralentissement chinois de 2015-16.
Ces producteurs s’échangent à un multiple de seulement 0,7 fois leur valeur comptable.
Les spéculateurs ont liquidé leurs mises sur le cuivre au même moment où les paris sur l’appréciation du dollar américain restent très populaires.
«La combinaison de ces deux facteurs envoie un signal contraire de pessimisme extrême, ce qui place le couvert pour un solide rebond en 2019», avance M. Roberge.
Le stratège suggère le fonds canadien négocié en Bourse iShares S&P/TSX Global Base Metals (XBM, 11,22$) et le FNB américain iShares MSCI Global Metals & Mining Producers (PICK, 28,34$US).
Il énumère aussi les cinq plus gros producteurs Teck Resources (TECK.B, 30,37$), First Quantum Minerals (FM, 11,22 $), Lundin Mining (LUN, 5,90$) et Hudbay Minerals (HUB, 7,19$) à la Bourse de Toronto.