« Les baby-boomers n’ont pas l’intention de vivre avec seulement 70 % de leur salaire, ils veulent 100 %, explique Daniel Plouffe, directeur régional, service de planification financière et successorale chez Sun Life. Cet effet est d’ailleurs amplifié lorsque, par exemple, ils se mettent à aller aux services funéraires de leurs amis vieillissants. Une sorte de sentiment d’urgence s’installe et ils se mettent parfois à dépenser impulsivement puisque, après tout, la vie est trop courte pour se priver d’un voyage ou d’une automobile! »
Dans Prendre sa retraite avec des dettes, un rapport de Katherine Marshall publié en 2011 par Statistique Canada, on apprenait que, chez les 55 ans et plus, le tiers des retraités et les deux tiers des non-retraités déclaraient avoir une dette sous une forme quelconque.
Selon Statistique Canada, environ 60 % des retraités, qu’ils soient célibataires ou en couple, avaient une dette de consommation seulement. Les 40 % restant étaient répartis presque également entre ceux ayant une dette hypothécaire uniquement et ceux ayant les deux formes d’endettement.
Éric Lebel, conseiller en redressement financier et syndic de faillite chez Raymond Chabot Grant Thornton corrobore ces chiffres : « Il y a vingt ans on ne voyait pas de retraités dans nos bureaux, mais maintenant on en voit régulièrement. À la retraite, il n’y a pas de coussin et le client ne peut pas se reprendre. Le jour où les choses tournent mal, le retraité ne pourra jamais rembourser ses créanciers et il devra vraisemblablement faire faillite. »
D’ailleurs, le rapport révèle que les retraités sont répartis aux deux extrêmes du spectre de l’endettement. En effet, la dette moyenne s’élevait à 60 000 $ en 2009, tandis que la médiane de la dette se chiffrait pour sa part à 19 000 $.
« Cet important écart entre la médiane et la moyenne est caractéristique d’une distribution asymétrique : répartition dans laquelle un petit groupe est fortement endetté par rapport à un autre groupe peu endetté », illustre Katherine Marshall dans son rapport.
Une question de budget
De façon générale, et bien que l’endettement et la retraite devraient être planifiés à tout âge, on devrait mener une revue de l’endettement d’un client de cinq à dix ans avant sa retraite. Idéalement, le client devrait prendre sa retraite sans dette, recommande Daniel Plouffe.
« Si on regarde le revenu disponible et qu’on voit qu’un remboursement de dette de 10 000 $ par année sur 10 ans sera nécessaire pour rembourser une dette de 100 000 $, la situation n’est pas trop grave. On essaie toutefois de régler la question avant 65 ans et de réviser nos prévisions tous les ans », conseille-t-il.
Les dettes non déductibles dont les taux d’intérêt sont les plus élevés devraient être payées en premier, suggère Daniel Plouffe : « En général, on commence par les cartes de crédit qui ont des taux de 19 à 24 %, puis les prêts auto avec leurs taux de 7 à 8 %, les marges de crédit suivent par la suite avec leurs taux de 2,5 %, et on termine par les prêts contractés pour les achats de meubles s’ils ont des taux inférieurs. »
Le budget, lui, ne termine pas sa vie active au moment de la retraite et devrait faire partie d’une bonne planification de cette étape de la vie du client, recommande Daniel Laverdière, directeur principal, Planification financière et conseil, à la Financière Banque Nationale.
« Les gens aiment parler de placement et de bourse, mais pas de budget. D’ailleurs, tous les clients ont besoin d’un budget même les plus fortunés, note Daniel Laverdière qui travaille auprès d’une clientèle fortunée chez Banque Nationale Gestion privée 1859. Ils ont de gros actifs, mais de grosses dépenses aussi. Il arrive qu’on ait des surprises lorsqu’on additionne toutes les dépenses faites dans une année. »
Il faut également prémunir le client contre un changement de contexte économique en s’assurant que son budget n’est pas trop serré. « Il faut aussi faire des tests de sensibilité sur ses revenus ou sur la variation de taux d’intérêt, en faisant monter de quelques points de pourcentage leur taux hypothécaire par exemple, et s’assurer que le budget du client tient la route même avec un changement de situation », conclut Daniel Laverdière.
Si les dépenses et les revenus ne sont pas équilibrés, le retraité peut aussi aller chercher un revenu d’appoint en prenant un emploi à temps partiel : « Ça peut être un emploi qui sert de loisir comme de revenu d’appoint, dit Daniel Plouffe. Ces sommes pourraient très bien aider à rembourser une dette contractée à la suite d’un imprévu. Les têtes grises qui travaillent dans des grands magasins, ce n’est pas un mythe. »