En effet, 77 % des répondants sondés dans le cadre de l’étude, intitulée Portrait 2013 de la finance responsable au Québec, soutiennent utiliser cette pratique de sélection. L’analyse des risques ESG est suivie par les pratiques d’exclusion, utilisées par 50 % des répondants, et l’engagement actionnariat, cité par 41 % des répondants. Les fonds alternatifs, les pratiques d’inclusion et l’immobilier sont utilisés par 36 %, 32 % et 23 % des répondants respectivement.
Deb Abbey, chef de la direction de l’Association pour l’investissement responsable (AIR) fait des observations semblables sur l’ensemble du marché canadien de l’investissement responsable. Selon elle, l’ESG prend plus de place dans l’esprit des gestionnaires.
« Nous voyons de plus en plus de gestionnaires de portefeuilles qui intègrent les facteurs ESG dans leur processus d’investissement, note-t-elle. Nous voyons cette transition se produire parmi plusieurs grands joueurs institutionnels, notamment chez les fonds communs de placement.»
Les pratiques de tamisage positives ou négatives, plus largement connues du public, sont aussi très populaires chez les gestionnaires. Au Québec, l’enquête a révélé que les critères d’exclusion les plus communs étaient le tabac, l’armement et l’environnement. Auparavant, les critères comme l’alcool, les jeux de hasard et la pornographie étaient ceux qui étaient les plus souvent utilisés dans les processus de tamisages négatifs.
En ce qui concerne les pratiques d’inclusion, les thèmes les plus couramment utilisés sont ceux du respect des droits de la personne, des relations de travail, des pratiques environnementales ainsi que de l’éthique et de la gouvernance.
L’investissement d’impact
L’investissement social, aussi connu sous sa traduction anglaise d’« impact investing », est également de plus en plus utilisé par les tenants du placement responsable. Rosalie Vendette, conseillère principale en investissement socialement responsable chez Desjardins, témoigne de cette tendance.
« C’est une thématique à la mode, et ce, même si des produits spécialisés là-dedans n’ont pas encore fait leur entrée sur le marché du détail. C’est un investissement qui mise d’abord sur les retombées sociales. Nous croyons qu’il y aura une importante demande des investisseurs individuels dès que des produits seront mis en marché d’ici quelques années.»
Selon elle, l’impact réel de l’investissement responsable est une variable qu’on souhaitera de plus en plus mesurer: « On donne de plus en plus d’importance aux notions de retombées qui nous permettent de prouver, à travers le temps, qu’on fait réellement une différence avec l’investissement responsable.»
Pour Fabien Durif, directeur de l’Observatoire ESG UQAM de la consommation responsable, cette notion prendra de plus en plus d’importance dans le futur. L’Observatoire vient d’ailleurs de lancer la plateforme Ethiquette.ca, en collaboration avec la firme conseil Ellio, qui vise à expliquer l’investissement responsable aux consommateurs.
« Nous allons essayer, dans l’avenir, de mesurer davantage l’impact de l’investissement responsable, note Fabien Durif. Beaucoup de particuliers l’essaient mais ne ressentent pas qu’ils ont un impact dans la réalité. Ils ont besoin qu’on leur explique s’il y a un changement. Malheureusement, il y a peu d’études où l’on fait un bilan de ce que l’investissement responsable a amené.»
Problème récurrent
Le mythe est toutefois tenace: certains particuliers croient encore que l’investissement responsable leur rapportera moins. En 2014, une étude de l’Observatoire ESG UQAM de la consommation responsable mentionnait que 9,1 % des gens croyaient que l’ISR allait engendrer un rendement largement inférieur à un investissement traditionnel, 26,2 % un rendement légèrement inférieur et 46,4 % un rendement identique.
« Le mythe de la performance est bien présent dans l’esprit de beaucoup d’investisseurs, indique Deb Abbey. Plusieurs d’entre eux se font dire qu’ils ne réussiront pas à obtenir des rendements intéressants. Ce n’est pas vrai, mais c’est malheureusement cru par une bonne partie du public.»
Rosalie Vendette abonde dans le même sens: « Les produits sur le marché démontrent que les rendements obtenus sont parfaitement comparables et que ce sont, en plus, des placements moins risqués. C’est une bonne nouvelle qui est pourtant peu connue par les investisseurs. Une entreprise qui gère bien les facteurs environnementaux, sociaux et sa gouvernance aura généralement une meilleure gestion dans son ensemble, c’est donc un bon investissement.»