– Des fluctuations économiques et financières au Royaume-Uni
À court terme, l’incertitude économique provoquée par un tel vote affecterait à la baisse la devise, les investissements et le Produit intérieur brut (PIB), selon un document rédigé par le département du Trésor du Royaume-Uni.
Mais le Centre pour la performance économique de la London School of Economics voit des conséquences durables: la séparation du Royaume-Uni aurait sans contredit un impact négatif sur les investissements étrangers directs, qui ont eux-mêmes des effets sur le salaire et la productivité du pays. « Le Royaume-Uni serait de façon permanente plus pauvre s’il quittait l’Union européenne », tranche le rapport du Trésor britannique.
– Incertitude sur les accords commerciaux
« Comme tous les accords commerciaux qui s’appliquent au Royaume-Uni ont été signés par l’Union européenne depuis 40 ans, le Royaume-Uni se retrouve sans accord commercial avec aucun pays dans le monde », résume Frédéric Mérand, directeur du Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal (CÉRIUM) et du Centre d’excellence sur l’Union européenne.
En étant dans l’Union européenne, le Royaume-Uni bénéficie d’une situation avantageuse avec les autres pays du continent, surtout qu’elle importe plus qu’elle n’exporte. Même avec les scénarios les plus optimistes du Centre pour la performance économique, cette sortie serait nuisible à l’économie britannique. Les partisans du « Brexit » souhaitent que le Royaume-Uni négocie à lui seul les accords commerciaux avec les autres pays dans le monde, mais rien ne garantit que ces ententes seraient plus rentables, selon les experts du Centre pour la performance économique.
– Plusieurs changements aux lois et aux règlements
« Depuis 50 ans, le Royaume-Uni a intégré dans tous les domaines des législations européennes, des règlements européens. Par exemple, n’importe quel bien produit ou n’importe quelle personne qui travaille ou n’importe quelle forme de capital, à partir du moment où elle est légale dans un pays, elle peut circuler librement dans toute l’Union européenne. Ça, ça va devoir être négocié », explique Frédéric Mérand.
Et le temps n’est pas illimité pour négocier: les pourparlers doivent durer un maximum de deux ans. Et si les dirigeants n’y arrivent pas, qu’est-ce qui se passe? « On ne le sait pas! C’est un processus qui va être très incertain », souligne M. Mérand.
– Une baisse de l’immigration
Entre 1995 et 2015, le nombre d’immigrants provenant de l’Europe a triplé, passant de 0,9 million à 3 millions. Il s’agit là de l’un des arguments phares du clan du « Non ». Mais tant le département du Trésor britannique que le Centre pour la performance économique soutiennent qu’une telle renonciation de la clause de libre circulation en Europe se ferait au prix d’ententes commerciales moins avantageuses, donc plus coûteuses pour les citoyens.
La Norvège et la Suisse, qui ont des ententes commerciales avec l’Europe, doivent accepter les immigrants provenant de l’Europe.
– Un effet boule de neige en Europe
Le Royaume-Uni serait le premier pays à se séparer de l’Union européenne. Pourrait-elle créer un précédent? « Il y a des gens qui pensent que ça va encourager, par exemple, les Néerlandais à faire la même chose. (…) Des pays comme les Pays-Bas, voire la France. Marine Le Pen (la chef du Front national) pourrait dire: « Regardez, le Royaume-Uni est parti, il n’y a pas eu de catastrophe » », remarque M. Mérand.
Cela incite d’ailleurs certains dirigeants à vouloir adopter la ligne dure dans les négociations pour dissuader les autres pays à faire de même.
Au-delà de ces prédictions, plusieurs questions demeurent en suspens encore aujourd’hui. « Le problème, actuellement, c’est que personne n’a mis de l’avant une idée de ce que serait (l’autre option). Est-ce que c’est juste de ne plus être dans l’Union européenne officiellement, mais de continuer à contribuer au budget de l’Union européenne, continuer à accepter la libre-circulation des personnes? (…) Ou est-ce qu’on va vers un système qui est juste de libre-échange? », indique M. Mérand.
Quelques mythes propagés durant la campagne…
– Si le Royaume-Uni décide de sortir, c’est le début de la fin pour l’Union européenne…
Selon Frédéric Mérand, cette affirmation ne semble pas valide. « Le Royaume-Uni n’est pas au coeur des principales politiques de l’Union européenne, la monnaie commune et l’espace Schengen, il n’en fait pas partie. Donc le coeur de l’Union européenne ne sera pas affecté », suggère-t-il, reconnaissant toutefois que ce serait « un coup » à la réputation de l’Europe. « Certains croient que ça va plutôt permettre à L’UE de se recentrer sur l’intégration qui a été longtemps bloquée par le Royaume-Uni », a-t-il ajouté.
– Le Royaume-Uni contribue davantage au budget de l’Union européenne…
Encore une fois, M. Mérand se montre sceptique. « C’est un argument qui est très faible, dans la mesure où il ne contribue pas tant que ça au budget, ce n’est pas quelque chose qui coûte cher au Royaume-Uni », explique-t-il.
– L’immigration a nui aux travailleurs britanniques et les nouveaux arrivants siphonnent les ressources des services publics…
Selon les chercheurs du Centre pour la performance économique, ce n’est pas le cas, et même que c’est le contraire; les nouveaux arrivants ont augmenté la productivité du pays. En fait, selon eux, les difficultés sur le plan de l’emploi s’expliqueraient davantage par les relents de la crise économique de 2008. Par ailleurs, les immigrants paient plus d’impôts qu’ils ne retirent de services, selon les mêmes données.