{"id":104360,"date":"2025-01-22T07:06:05","date_gmt":"2025-01-22T12:06:05","guid":{"rendered":"https:\/\/www.finance-investissement.com\/?p=104360"},"modified":"2025-01-22T07:06:05","modified_gmt":"2025-01-22T12:06:05","slug":"laffaire-4258843-canada-inc-c-kpmg","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/www.finance-investissement.com\/zone-experts_\/apff\/laffaire-4258843-canada-inc-c-kpmg\/","title":{"rendered":"L\u2019affaire 4258843 Canada inc. c. KPMG"},"content":{"rendered":"

Le 6 mars 2024, dans l\u2019affaire 4258843 Canada inc.<\/em> c. KPMG<\/em>, 2024 QCCS 760, la Cour sup\u00e9rieure du Qu\u00e9bec a retenu la responsabilit\u00e9 professionnelle du cabinet KPMG et l\u2019a condamn\u00e9 \u00e0 payer des dommages de 3\u00a0934\u00a0090,23\u00a0$ qui, si l\u2019on additionne les int\u00e9r\u00eats l\u00e9gaux et l\u2019indemnit\u00e9 additionnelle pr\u00e9vue au Code civil du Qu\u00e9bec<\/em>, totalisent plus de 5,7 M$.<\/p>\n

Quelle est l\u2019origine de cette condamnation\u2009? Un fiscaliste a us\u00e9 du paragraphe 75(2) de la Loi de l\u2019imp\u00f4t sur le revenu <\/em>(\u00ab\u00a0L.I.R.\u00a0\u00bb) afin de permettre l\u2019attribution des revenus de dividendes, sans imposition, en faveur d\u2019un individu alors que l\u2019imp\u00f4t payable en lien avec ces dividendes \u00e9tait attribu\u00e9 sans cons\u00e9quence fiscale \u00e0 une soci\u00e9t\u00e9 de gestion.<\/p>\n

Mise en contexte<\/p>\n

Avant d\u2019aborder l\u2019affaire qui nous int\u00e9resse, il faut remonter les pendules jusqu\u2019aux ann\u00e9es 2004-2005. \u00c0 titre de rappel, c\u2019est \u00e0 cette p\u00e9riode que le concept de planifications fiscales agressives commen\u00e7ait \u00e0 circuler alors que les r\u00e8gles de divulgation obligatoire d\u2019op\u00e9rations \u00e0 d\u00e9clarer et \u00e0 signaler n\u2019existaient pas encore. De l\u2019aveu m\u00eame de l\u2019expert t\u00e9moignant pour KPMG dans l\u2019affaire, c\u2019\u00e9tait le \u00ab\u00a0wild west\u00a0\u00bb en 2005. \u00c0 l\u2019automne 2005, la Cour supr\u00eame du Canada rend l\u2019arr\u00eat Hypoth\u00e8ques Trustco Canada<\/em> c. Canada<\/em>, 2005 CSC 54, r\u00e9sumant l\u2019approche relative \u00e0 l\u2019article 245 L.I.R., soit la r\u00e8gle g\u00e9n\u00e9rale anti-\u00e9vitement (\u00ab\u00a0RGA\u00c9\u00a0\u00bb).<\/p>\n

\u00c0 cette \u00e9poque, plusieurs fiscalistes avaient \u00e9labor\u00e9, \u00e0 travers le Canada, une s\u00e9rie d\u2019op\u00e9rations (ou de transactions) donnant effet \u00e0 la r\u00e8gle sp\u00e9cifique anti-\u00e9vitement du paragraphe 75(2) L.I.R. tout en \u00e9vitant le paiement de l\u2019imp\u00f4t pour le particulier. Cette planification, bien qu\u2019elle comporte plusieurs variantes, consiste essentiellement en ce qui suit\u00a0:<\/p>\n

1)\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 Une soci\u00e9t\u00e9 de gestion (\u00ab\u00a0Gesco\u00a0\u00bb) est constitu\u00e9e;<\/p>\n

2)\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 Une fiducie familiale discr\u00e9tionnaire (\u00ab\u00a0Fiducie\u00a0\u00bb) est cr\u00e9\u00e9e, dont Gesco, notamment, en est d\u00e9sign\u00e9e b\u00e9n\u00e9ficiaire;<\/p>\n

3)\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 L\u2019actionnaire (\u00ab\u00a0M. X\u00a0\u00bb) d\u2019une soci\u00e9t\u00e9 en exploitation (\u00ab\u00a0Opco\u00a0\u00bb) r\u00e9alise un gel des actions d\u2019Opco et Gesco souscrit aux nouvelles actions participantes d\u2019Opco;<\/p>\n

4)\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 Gesco fait don des actions participantes d\u2019Opco \u00e0 Fiducie donnant ouverture au paragraphe 75(2) L.I.R., de sorte que tout revenu provenant du bien (les dividendes sur les actions d\u00e9tenues par Fiducie dans Opco) doit \u00eatre attribu\u00e9 aux fins fiscales \u00e0 Gesco (la personne qui a transf\u00e9r\u00e9 le bien sans contrepartie en se gardant un droit de retour, du fait qu\u2019elle en \u00e9tait b\u00e9n\u00e9ficiaire);<\/p>\n

5)\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 Opco d\u00e9clare un dividende \u00e0 son actionnaire, Fiducie;<\/p>\n

6)\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 Fiducie attribue ce dividende \u00e0 n\u2019importe lequel de ses b\u00e9n\u00e9ficiaires, incluant M. X., alors que l\u2019imp\u00f4t relatif \u00e0 ce dividende est automatiquement attribu\u00e9 \u00e0 Gesco en vertu du paragraphe 75(2) L.I.R. Il n\u2019y a aucun imp\u00f4t \u00e0 payer pour Gesco qui b\u00e9n\u00e9ficie de la d\u00e9duction du paragraphe 112(1) L.I.R. Ainsi, la s\u00e9rie de transactions \u00e9vite l\u2019imp\u00f4t de la partie I L.I.R. pour l\u2019individu et pour Gesco et il n\u2019y a pas d\u2019imp\u00f4t de la partie IV L.I.R. payable, puisque Gesco et Opco sont rattach\u00e9es;<\/p>\n

7)\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 Le r\u00e9sultat de cette habile planification est que M. X peut encaisser tous les dividendes provenant d\u2019Opco sans avoir \u00e0 payer d\u2019imp\u00f4ts.<\/p>\n

Est-ce trop beau pour \u00eatre vrai\u2009?<\/p>\n

La gen\u00e8se de l\u2019affaire <\/strong>4258843 Canada inc.<\/em><\/strong> c. KPMG<\/em><\/strong><\/p>\n

En 2005, KMPG a mis en place pour son client une structure similaire \u00e0 celle d\u00e9crite ci-dessus. L\u2019Agence du revenu du Canada (ARC) a \u00e9tabli des cotisations pour les ann\u00e9es 2005, 2006 et 2007 en se fondant sur la\u00a0RGA\u00c9. Le contribuable s\u2019est oppos\u00e9 aux cotisations dans l\u2019affaire Fiducie Financi\u00e8re Satoma <\/em>c. La Reine<\/em>, 2017 CCI 84, et a perdu. Portant la d\u00e9cision en appel, le contribuable a de nouveau perdu (2018 CAF 74). La Cour d\u2019appel du Qu\u00e9bec a conclu que les nouvelles cotisations \u00e9tablies par la ministre en vertu du paragraphe 245(5) L.I.R. avaient pour effet de supprimer l\u2019avantage obtenu par le contribuable et qu\u2019il s\u2019agissait d\u2019un ajustement raisonnable compte tenu de l\u2019abus que la ministre a r\u00e9ussi \u00e0 d\u00e9montrer.<\/p>\n

Nous, les fiscalistes, consacrons beaucoup de temps \u00e0 lire et analyser les d\u00e9cisions des tribunaux sp\u00e9cialis\u00e9s en mati\u00e8re de fiscalit\u00e9 pour bien comprendre les param\u00e8tres impos\u00e9s par les lois fiscales. Cependant, il nous arrive plus rarement d\u2019aller voir derri\u00e8re le rideau pour conna\u00eetre ce qu\u2019il advient du fiscaliste qui a propos\u00e9 une strat\u00e9gie \u00e0 son client lorsque cette strat\u00e9gie \u00e9choue et que le client se voit contraint de payer de l\u2019imp\u00f4t qui n\u2019\u00e9tait pas pr\u00e9vu. Pourtant, quel fiscaliste ne sent pas l\u2019\u00e9p\u00e9e de Damocl\u00e8s qui pend dangereusement au-dessus de sa t\u00eate chaque fois qu\u2019il signe une opinion, donne une recommandation ou planifie une r\u00e9organisation\u2009?<\/p>\n

La responsabilit\u00e9 du fiscaliste \u2014 R\u00e9sum\u00e9 de l\u2019affaire 4258843 Canada inc.<\/em> c. KPMG<\/em><\/strong><\/p>\n

Dans cette affaire, le juge Thomas M. Davis reprend l\u2019historique de la relation entre les parties. Comme dans toute d\u00e9cision rendue par un tribunal de premi\u00e8re instance, il d\u00e9crit les t\u00e9moignages de chacune des parties ainsi que ceux de leurs experts et \u00e9value leur valeur probante. Il accorde plus de valeur \u00e0 la description des faits du contribuable et de son expert qu\u2019aux t\u00e9moignages du fiscaliste et de son expert.<\/p>\n

En ce qui a trait \u00e0 l\u2019analyse, le juge conclut que le fiscaliste a commis une faute professionnelle et est redevable pour les dommages r\u00e9clam\u00e9s, exception faite de la somme de 150\u00a0000\u00a0$ repr\u00e9sentant les honoraires demand\u00e9s au client.<\/p>\n

D\u2019abord, le tribunal indique que son r\u00f4le n\u2019est pas de consid\u00e9rer la raisonnabilit\u00e9 de la conclusion du fiscaliste selon laquelle la r\u00e9organisation n\u2019\u00e9tait pas une op\u00e9ration d\u2019\u00e9vitement, mais plut\u00f4t si le fiscaliste a satisfait \u00e0 son devoir de conseil envers son client. M\u00eame si le fiscaliste \u00e9tait d\u2019avis qu\u2019il n\u2019y avait pas une op\u00e9ration d\u2019\u00e9vitement, il devait discuter avec son client des cons\u00e9quences d\u2019une mauvaise \u00e9valuation de la strat\u00e9gie de sa part et de la possibilit\u00e9 que les autorit\u00e9s fiscales ne partagent pas son avis. Une simple r\u00e9serve \u00e9crite g\u00e9n\u00e9rale en annexe du m\u00e9mo n\u2019est pas suffisante. Il s\u2019agit de la premi\u00e8re prise contre le fiscaliste dans l\u2019affaire.<\/p>\n

Un comit\u00e9 interne form\u00e9 par KPMG et devant v\u00e9rifier l\u2019application de la RGA\u00c9 s\u2019est pench\u00e9 sur la planification for\u00e7ant l\u2019application du paragraphe 75(2) L.I.R. et a adopt\u00e9 une position g\u00e9n\u00e9rale selon laquelle elle pouvait \u00eatre acceptable \u00e0 condition qu\u2019il existe des motifs \u00e9conomiques justifiant sa mise en place, ces motifs ne pouvant \u00eatre la simple \u00e9conomie d\u2019imp\u00f4ts. Le comit\u00e9 ne s\u2019est pas pench\u00e9 sur les particularit\u00e9s du cas sp\u00e9cifique du client. Le tribunal consid\u00e8re que le motif \u00e9conomique soutenu par le fiscaliste, soit la protection d\u2019actif, n\u2019est pas acceptable, puisqu\u2019une structure de protection d\u2019actif op\u00e9rationnelle \u00e9tait d\u00e9j\u00e0 en place dans le groupe des soci\u00e9t\u00e9s du client.<\/p>\n

En ce sens, le tribunal s\u2019interroge afin de savoir pourquoi le fiscaliste n\u2019a pas \u00e9valu\u00e9 le risque que les autorit\u00e9s fiscales concluent que le but premier de la nouvelle structure \u00e9tait de procurer un avantage fiscal. Minimalement, le fiscaliste aurait d\u00fb avoir une discussion compl\u00e8te et d\u00e9taill\u00e9e avec le client quant au risque que les autorit\u00e9s fiscales y voient un avantage fiscal et appliquent la RGA\u00c9. Les cons\u00e9quences d\u2019une application possible devaient \u00e9galement \u00eatre discut\u00e9es. Voil\u00e0 une deuxi\u00e8me prise.<\/p>\n

Le fiscaliste a argument\u00e9 que le client avait insist\u00e9 sur la cr\u00e9ation d\u2019une nouvelle fiducie, mais le tribunal retient que le fiscaliste devait alors discuter avec le client du risque accru que les autorit\u00e9s fiscales y voient un abus alors que la premi\u00e8re fiducie prot\u00e9geait d\u00e9j\u00e0 ses actifs. Le tribunal estime que, pour satisfaire au devoir de comp\u00e9tence que le fiscaliste admet avoir, il devait consid\u00e9rer si le niveau de protection d\u2019actif que le client voulait pouvait \u00eatre atteint en se servant de la fiducie existante, ce que le fiscaliste n\u2019a pas fait, puisqu\u2019il \u00e9tait fix\u00e9 sur la cr\u00e9ation d\u2019une deuxi\u00e8me fiducie.<\/p>\n

Le juge mentionne que le client n\u2019avait pas renonc\u00e9 \u00e0 ce que le fiscaliste fasse une analyse de l\u2019application de la RGA\u00c9 et va plus loin en indiquant que m\u00eame si une telle entente existait, elle n\u2019aurait pas lib\u00e9r\u00e9 le fiscaliste de sa responsabilit\u00e9. En effet, un tel accord ne dispense pas le fiscaliste de son obligation de faire une analyse si une analyse est n\u00e9cessaire, ou simplement utile, afin de bien conseiller le client. Troisi\u00e8me prise.<\/p>\n

Le tribunal ajoute que l\u2019obligation du fiscaliste de tenir le client inform\u00e9 du risque d\u2019application de la RGA\u00c9 ne prenait pas fin en 2005, mais s\u2019\u00e9tendait au-del\u00e0, en citant l\u2019\u00e9volution de l\u2019interpr\u00e9tation qu\u2019a faite l\u2019ARC \u00e0 des tables rondes en 2006. Le juge Davis d\u2019exprime ainsi\u00a0:<\/p>\n

\u00ab\u00a0[142]\u00a0Mais, il y a plus. Le Tribunal estime \u00e9galement que l\u2019obligation de KPMG de tenir M. Pilon inform\u00e9 du risque de l\u2019application de la RGA\u00c9 ne prenait pas fin en 2005.<\/u> La fiscalit\u00e9 est en constante \u00e9volution, et en 2006, il y avait une nouvelle table ronde qui se pronon\u00e7ait sur l\u2019article 75(2) de la LIR et la vision de la CRA a chang\u00e9\u00a0:<\/span><\/p>\n

\n

Il est \u00e0 noter cependant que dans une situation telle que celle d\u00e9crite ci-haut, de m\u00eame que dans une situation telle que celle consid\u00e9r\u00e9e \u00e0 la question 3 de la TABLE RONDE SUR LA FISCALIT\u00c9 F\u00c9D\u00c9RALE APFF – CONGR\u00c8S 2005, l\u2019utilisation d\u2019une disposition anti-\u00e9vitement telle que le paragraphe 75(2) L.I.R. dans le but d\u2019obtenir un avantage fiscal (en l\u2019esp\u00e8ce, l\u2019utilisation du paragraphe 75(2) L.I.R. combin\u00e9e \u00e0 celle du paragraphe 112(1) L.I.R. permet d\u2019\u00e9viter le paiement de tout imp\u00f4t \u00e0 l\u2019\u00e9gard des dividendes re\u00e7us par la Fiducie X et distribu\u00e9s \u00e0 ses b\u00e9n\u00e9ficiaires) entra\u00eenerait l\u2019application du paragraphe 245(2) L.I.R.<\/span><\/p>\n<\/blockquote>\n

[143]\u00a0Des conseils ponctuels sur cette nouvelle approche de l\u2019ARC auraient pu mener \u00e0 des rectifications de la structure et minimiser tant le risque que l\u2019\u00e9tendue d\u2019une cotisation.<\/span><\/p>\n

[144]\u00a0Devant ces \u00e9l\u00e9ments, le Tribunal conclut que KPMG n\u2019a pas satisfait \u00e0 son devoir de conseil.\u00a0\u00bb<\/span> (Notre soulignement)<\/p>\n

Au bout du compte, le tribunal d\u00e9termine que le fiscaliste est redevable de l\u2019imp\u00f4t et des int\u00e9r\u00eats pay\u00e9s par le client, car n\u2019e\u00fbt \u00e9t\u00e9 la nouvelle structure implant\u00e9e par le fiscaliste, ces sommes auraient pu rester dans la structure corporative existante du client pour financer ses acquisitions. De surcro\u00eet, le fiscaliste a pr\u00e9sent\u00e9 \u00e0 son client que la fiducie n\u2019aurait jamais d\u2019imp\u00f4t \u00e0 payer, sous r\u00e9serve de la discussion tr\u00e8s sommaire de la RGA\u00c9 et que tous les fonds de la soci\u00e9t\u00e9 en exploitation seraient disponibles pour faire des acquisitions. Toutefois, le client a \u00e9t\u00e9 priv\u00e9 de ces sommes dans l\u2019ex\u00e9cution de son plan d\u2019affaires, puisqu\u2019il a d\u00fb payer de l\u2019imp\u00f4t.<\/p>\n

Grands constats<\/strong><\/p>\n

Nous pouvons tirer quelques grands constats \u00e0 l\u2019aide de trois citations tir\u00e9es de la d\u00e9cision\u00a0:<\/p>\n

    \n
  • Le devoir de conseil du fiscaliste comprenant l\u2019obligation d\u2019informer le client quant aux risques d\u2019une planification fiscale\u00a0:<\/li>\n<\/ul>\n

    \u00ab\u00a0[90] Quant au caract\u00e8re agressif ou non de la strat\u00e9gie, pour M. Weissman, elle n\u2019\u00e9tait pas tr\u00e8s agressive, mais plut\u00f4t simplement agressive, comme le Tribunal a dit. Mais, ce qu\u2019il avance pour conclure \u00e0 la nature agressive de la strat\u00e9gie est fort int\u00e9ressant. Il dit que la strat\u00e9gie pr\u00e9voyait l\u2019utilisation d\u2019une r\u00e8gle anti-\u00e9vitement pour un but non envisag\u00e9 par la r\u00e8gle. Ainsi, pour le Tribunal, il semble logique que le devoir d\u2019informer M. Pilon des risques de la strat\u00e9gie propos\u00e9e soit plus important<\/u>.\u00a0\u00bb<\/span><\/p>\n

    \u00ab\u00a0[153] Deux choses sautent aux yeux du Tribunal. Premi\u00e8rement, avec le peu de marqueurs pour interpr\u00e9ter la RGA\u00c9, le Tribunal estime que le devoir d\u2019informer le client du risque \u00e9tait encore plus important<\/u>. Il \u00e9tait s\u00fbrement de mise de discuter des pours et des contres avec le client et cela n\u2019a pas \u00e9t\u00e9 fait par KPMG dans le pr\u00e9sent cas, [\u2026].\u00a0\u00bb<\/span> (Notre soulignement)<\/p>\n

      \n
    • Le r\u00e9sultat promis par le fiscaliste \u00e0 son client tient plus de l\u2019obligation de r\u00e9sultat que de l\u2019obligation de moyens\u00a0:<\/li>\n<\/ul>\n

      \u00ab\u00a0[160] Ainsi, le Tribunal est d\u2019accord avec KPMG qu\u2019elle ne serait redevable d\u2019aucun dommage si M. Pilon ou FFLP avait eu \u00e0 payer des imp\u00f4ts, peu importe que Satoma soit constitu\u00e9e ou reste lettre morte. Cependant, la preuve est \u00e0 l\u2019effet que c\u2019est la cr\u00e9ation de Satoma qui a d\u00e9clench\u00e9 tant l\u2019application de l\u2019article 75(2) que le recours \u00e0 la RGA\u00c9 par l\u2019ARC. KPMG est redevable pour l\u2019imp\u00f4t et les int\u00e9r\u00eats pay\u00e9s par Satoma, car, n\u2019e\u00fbt \u00e9t\u00e9 la nouvelle structure implant\u00e9e par KPMG, ces sommes auraient pu rester dans la structure corporative existante de M. Pilon pour financer des acquisitions.<\/u>\u00a0\u00bb<\/span> (Notre soulignement)<\/p>\n

        \n
      • Le fiscaliste a l\u2019obligation d\u2019informer son client des nouveaux d\u00e9veloppements pertinents\u00a0:<\/li>\n<\/ul>\n

        \u00ab\u00a0[149] Or, le mandat de KPMG envers M. Pilon allait au-del\u00e0 de l\u2019implantation d\u2019une nouvelle structure. Elle, par l\u2019entremise de M. Proulx, \u00e9tait sa conseill\u00e8re fiscale. Elle avait non seulement le devoir de le conseiller sur la nouvelle structure en consid\u00e9rant tous les faits pertinents et toutes les solutions possibles, mais \u00e9galement celui de l\u2019informer de tout nouveau d\u00e9veloppement en fiscalit\u00e9 pertinent \u00e0 sa situation<\/u>. Ici, ses repr\u00e9sentants se sont fix\u00e9s sur l\u2019opportunit\u00e9 de vendre la nouvelle solution de Me B\u00e9langer et M.\u00a0Charest \u00e0 M. Pilon. Qui plus est, ils n\u2019ont pas revisit\u00e9 la recommandation faite \u00e0 M. Pilon \u00e0 la suite de l\u2019arr\u00eat Hypoth\u00e8ques Trustco Canada <\/em>ou de la r\u00e9vision de la position de l\u2019ARC annonc\u00e9e \u00e0 la Table Ronde de 2006.<\/u><\/span><\/p>\n

        [150] Il s\u2019agit d\u2019un comportement fautif, surtout dans l\u2019optique o\u00f9 le r\u00f4le de KPMG envers M. Pilon allait bien au-del\u00e0 de l\u2019implantation de Satoma.\u00a0\u00bb (Notre soulignement)<\/span><\/span><\/p>\n

        Conclusion<\/strong><\/p>\n

        Cette affaire est importante, puisqu\u2019elle met en relief plusieurs devoirs du fiscaliste. Dans sa plaidoirie, KPMG a avanc\u00e9 que ses devoirs se r\u00e9sumaient au conseil, \u00e0 la comp\u00e9tence, \u00e0 la discr\u00e9tion, \u00e0 la loyaut\u00e9 et \u00e0 l\u2019ind\u00e9pendance et plaide qu\u2019il est tenu \u00e0 une obligation de moyens \u00e0 l\u2019endroit de son client.<\/p>\n

        Le tribunal se penche plus particuli\u00e8rement sur le devoir de conseil et y ajoute les variantes suivantes\u00a0:<\/p>\n

          \n
        • le devoir de s\u2019interroger sur les demandes du client;<\/li>\n
        • le devoir d\u2019informer le client des risques; et<\/li>\n
        • le devoir de tenir le client inform\u00e9 des nouveaux d\u00e9veloppements.<\/li>\n<\/ul>\n

          Le tribunal finit par trancher que le fiscaliste n\u2019a pas satisfait \u00e0 son devoir de conseil et le tient responsable des imp\u00f4ts pay\u00e9s par le client. Il ressort de la d\u00e9cision que le fiscaliste est consid\u00e9r\u00e9 comme un expert, ce qui rehausse l\u2019\u00e9tendue de son devoir de conseil qu\u2019il ne peut endiguer en reconnaissant les limites de sa comp\u00e9tence.<\/p>\n

          Finalement, la d\u00e9cision a \u00e9t\u00e9 port\u00e9e en appel et la saga n\u2019est pas termin\u00e9e. Esp\u00e9rons que la Cour d\u2019appel du Qu\u00e9bec prendra le temps de mieux encadrer les diff\u00e9rents devoirs du fiscaliste et que cela n\u2019inclura pas une obligation de tenir le client inform\u00e9 des nouveaux d\u00e9veloppements pouvant avoir une incidence sur une planification mise en place dans le pass\u00e9, \u00e0 moins que cela fasse explicitement partie du mandat du professionnel. En attendant, quand c\u2019est trop beau pour \u00eatre vrai, le fiscaliste devrait voir certains signaux d\u2019alarme et au minimum faire valider sa planification par des coll\u00e8gues. En fiscalit\u00e9, on peut raisonnablement reporter le moment o\u00f9 de l\u2019imp\u00f4t devient payable, optimiser la situation du contribuable en jouant avec les taux progressifs, multiplier l\u2019usage de la d\u00e9duction pour gains en capital et m\u00eame tenter le magnum opus<\/em> fiscal de convertir un dividende en gain en capital. Cependant, peut-on \u00e9viter purement et simplement le paiement de tout imp\u00f4t par un contribuable\u2009? C\u2019est \u00e0 chaque professionnel et \u00e0 son client de g\u00e9rer le risque qu\u2019ils sont pr\u00eats \u00e0 prendre.<\/p>\n

          Par Thierry L. Martel<\/strong>, avocat, M. Fisc., Martel Cantin, Avocats, thierrymartel@martelcantin.ca<\/p>\n

          Ce texte a \u00e9t\u00e9 publi\u00e9 initialement dans le magazine Strat\u00e8ge de l\u2019APFF, vol. 29, no<\/sup> 3 (Automne 2024).<\/em><\/span><\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

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