Avec des actifs sous gestion dépassant aujourd’hui les trois milliards de dollars (G$), le crédit privé reste une source vitale de financement alternatif pour l’économie réelle, bénéficiant à la fois aux emprunteurs et aux investisseurs.
Le 27 janvier, l’Alternative Investment Management Association (AIMA) est retournée à Miami pour la quatrième édition de son forum annuel des investisseurs en crédit privé, réunissant des dirigeants du secteur à l’échelle mondiale afin d’examiner les dynamiques du marché et les prochaines orientations du secteur.
L’AIMA est la plus grande association de gestionnaires d’investissements alternatifs au monde. Elle compte plus de sociétés gérant plus d’actifs que tout autre organisme du secteur et, grâce à ses 10 bureaux répartis dans le monde entier, elle sert plus de 2 000 membres dans 60 pays différents.
Le forum a mis en lumière plusieurs thèmes clés qui façonnent le marché du crédit privé :
L’expansion du crédit privé se poursuit, car les investisseurs institutionnels recherchent des sources de revenus solides.
Avec des actifs sous gestion dépassant les 3 G$, le crédit privé s’est fermement affirmé comme une allocation de base pour les investisseurs institutionnels. Les capitaux se détournent des titres à revenu fixe traditionnels en raison des rendements ajustés aux risques attrayants, de la volatilité plus faible et des avantages en matière de diversification. Les domaines de croissance au-delà du prêt direct comprennent le financement adossé à des actifs, l’immobilier et la dette d’infrastructure, l’Europe étant en pleine maturité et l’Asie-Pacifique émergeant comme une région clé pour l’expansion.
L’intégration du crédit public et privé redéfinit les stratégies de portefeuille.
La confusion entre le crédit public et le crédit privé a conduit les investisseurs à opter pour des fonds permanents, des fonds à intervalles et des comptes gérés séparément afin de maintenir des allocations flexibles, mais disciplinées. Les primes de liquidité restent cruciales, ce qui nécessite un équilibre entre l’amélioration du rendement et une gestion prudente du risque. La transparence et la discipline en matière d’évaluation, y compris l’établissement de rapports fréquents, deviennent la norme.
Les intermédiaires de crédit et le financement par la valeur de l’actif net favorisent l’optimisation du portefeuille.
Les établissements secondaires de crédit ont atteint des volumes de transaction record, offrant aux investisseurs privés des solutions efficaces de rééquilibrage et de liquidité. Le financement par la valeur de l’actif net, qui était autrefois une stratégie de niche, est aujourd’hui essentiel pour les fonds d’investissement afin de restructurer les actifs, d’allonger les horizons d’investissement et d’optimiser le placement du capital, ce qui renforce son rôle en tant qu’outil de base du portefeuille.
Les financements garantis par des actifs, la dette immobilière et la dette d’infrastructure offrent diversification et stabilité.
Le financement basé sur les actifs (Asset-Based Finance : ABF) continue de se développer, avec des occasions de prêt dans le transport, la location de matériel, les avances de fonds aux commerçants et le financement structuré de la consommation. La dette immobilière et la dette d’infrastructure gagnent également du terrain, les investisseurs recherchant des actifs à long terme couverts contre l’inflation et une exposition à d’autres sources de flux de trésorerie stables et prévisibles.
Le crédit privé européen arrive à maturité, celui de l’Asie-Pacifique devrait suivre.
L’Europe représente aujourd’hui environ 30 % des actifs mondiaux du crédit privé, grâce à l’évolution de la réglementation et aux flux de capitaux institutionnels. Si les États-Unis continuent d’être le marché dominant, les investisseurs augmentent leurs allocations au crédit structuré et au financement d’infrastructures en Europe, tandis que l’Asie-Pacifique est en voie de devenir la prochaine grande région de croissance.
Le stress du portefeuille reste gérable, avec un effet de levier à des niveaux historiquement bas.
Alors que l’augmentation des défauts de paiement et des exercices de gestion du passif (LME) indique un stress croissant de la part des emprunteurs, les LME restent largement confinés au marché des prêts syndiqués (Broadly Syndicated Loan : BSL). Des taux de quotité du prêt relativement bas, une croissance régulière du bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement (BAIIDA) et une gestion proactive des risques contribuent à la viabilité du marché. Les ajustements à la baisse des portefeuilles ont été compensés par des tendances économiques positives, ce qui permet au crédit privé d’être bien positionné afin de poursuivre sa croissance.
La consolidation du marché s’intensifie, créant des occasions pour les gestionnaires émergents tout en suscitant des inquiétudes chez les investisseurs privés.
Alors que 20 % des principaux dirigeants sont responsables d’environ 80 % du placement des capitaux, la consolidation croissante est en train de redéfinir l’industrie. Les investisseurs ne considèrent pas nécessairement la consolidation comme une tendance positive, citant les défis d’intégration, les changements culturels et l’évolution des structures d’incitation. Les gestionnaires de niche émergents trouvent des occasions de rivaliser en se concentrant sur des stratégies de crédit privé spécialisées et des secteurs de prêt non essentiels, offrant ainsi des options différenciées au-delà des grandes entreprises.
Les investisseurs institutionnels exigent davantage d’alignement, de transparence et d’analyse comparative.
Face à l’intensification de la concurrence pour attirer les capitaux, les investisseurs privés réclament un meilleur alignement des commissions, des possibilités de co-investissement et des commissions basées sur la performance. L’analyse comparative personnalisée et la nécessité d’identifier la véritable génération d’alpha deviennent des éléments clés de l’évaluation des gestionnaires, ce qui renforce l’importance d’une création de valeur démontrée.
Les allocations à long terme au crédit privé augmentent, mais la sélectivité reste essentielle.
Les investisseurs passent d’une allocation de crédit privé opportuniste à une allocation de crédit privé permanent, conscients de la stabilité de ce dernier à travers les cycles. Cependant, la compression des écarts et la concurrence nécessitent une sélection disciplinée des gestionnaires et une diversification des stratégies. Les stratégies « d’aménagement et d’expansion », les comptes gérés séparément et la flexibilité juridictionnelle sont aujourd’hui des éléments essentiels de la construction d’un portefeuille.
L’innovation et la spécialisation définiront la prochaine phase du crédit privé.
Alors que le crédit privé évolue, l’innovation dans les structures de financement, la gestion des risques et la création d’actifs définira la prochaine phase de croissance. Les gestionnaires qui tirent parti d’une expertise spécialisée, d’un approvisionnement différencié et de stratégies adaptatives seront les mieux placés pour capter les capitaux institutionnels à long terme. Les investisseurs affinent leur approche afin d’équilibrer le risque, la liquidité et les occasions.
L’intérêt des assureurs envers le crédit privé va s’étendre aux offres soutenues par des actifs, mais il sera conditionné par les nouvelles réglementations.
Les assureurs devraient augmenter leur participation au crédit privé, en particulier dans les produits financés par des actifs de qualité. Les réglementations en matière d’investissement récemment finalisées et à venir par les régulateurs d’assurance des États pourraient avoir un impact significatif sur les préférences des assureurs pour certains titres financés par des actifs, en fonction de la forme finale des nouveaux modèles d’évaluation et des charges de capital.