La cadence endiablée des activités de fusion et acquisition (F&A) à l’échelle mondiale semble s’être quelque peu atténuée, particulièrement dans l’univers des entreprises à mégacapitalisation où les ententes de haut profil font l’objet d’un scrutin rigoureux par les autorités, comme c’est le cas par exemple pour Microsoft/Activision Blizzard Inc., Black Knight Inc./ Intercontinental Exchange, Inc. et Broadcom/VMware.
En plus de ce milieu réglementaire peu hospitalier, s’ajoutent les pressions macroéconomiques causées par la hausse des taux d’intérêt et le spectre d’une éventuelle récession. Toutefois, tout juste derrière les projecteurs braqués sur les mégacapitalisations et les macrofacteurs, se dessinent des dislocations intéressantes sur le plan des prix et s’accumule une importante demande refoulée dans l’univers des PME. Cette situation pourrait engendrer un flot accéléré d’ententes plus tard au courant de l’année.
À la lumière des taux d’intérêt élevés, certains investisseurs se demandent s’ils ne devraient pas tout simplement opter pour un compte d’épargne à intérêt élevé, un CPG, un fonds indiciel obligataire de longue durée, voire une pile d’actions versant des dividendes élevés, jusqu’à ce que les marchés affichent leurs vraies couleurs. Le problème subsiste toutefois : ces actifs sont corrélés au marché et aux taux d’intérêt à court terme.
Aussi, dans ce milieu boursier incertain caractérisé par une inflation toujours bien au-dessus de sa cible, on note des zones de détresse économique, notamment dans les secteurs bancaires, de l’immobilier commercial, du détail ainsi que chez les consommateurs. Traditionnellement, le moment serait tout indiqué pour se tourner vers les obligations, mais les taux d’intérêt demeurent une source formidable d’instabilité. Puis, comme nous avons pu le constater l’année dernière, il n’est pas garanti que les obligations fourniront un rendement faiblement corrélé. En fait, en 2022, les avoirs obligataires n’ont pas contribué à diminuer les pertes boursières, ils les ont alourdies.
C’est la raison pour laquelle à l’heure actuelle les conseillers en services financiers recommandent plus souvent à leurs clients d’injecter une dose d’actifs alternatifs à leur portefeuille, comme les solutions d’arbitrage sur fusion, puisque celles-ci sont en mesure de diversifier leurs avoirs et de fournir des rendements absolus faiblement corrélés aux autres actifs. L’arbitrage sur fusion cherche à dégager des rendements en misant sur l’écart entre le cours boursier et le prix offert dans le cadre d’une entente de fusion annoncée et contraignante sur le plan juridique.
Cette stratégie ne dépend pas de la direction du marché ni de ses prouesses, et de ce fait, permet de réduire la volatilité du portefeuille et d’en améliorer la stabilité. Notons à cet égard que depuis 1990, l’indice HFRI Merger Arbitrage n’a enregistré que deux rendements annuels négatifs.
Parmi les avantages des stratégies d’arbitrage sur fusion, on retrouve leur faible corrélation (beta) aux actions et aux obligations, ce qui selon nous permet de diminuer les pertes, de réduire les risques encourus et d’offrir un meilleur rendement d’ensemble lorsqu’elles sont ajoutées à un portefeuille traditionnel 60/40.
Pendant les périodes de forte volatilité, les portefeuilles à découvert peuvent subir des baisses importantes qui viennent interrompre les effets de la composition au sein de celui-ci. Les stratégies d’arbitrage sur fusion sont idiosyncrasiques de nature, c’est-à-dire que les facteurs qui influencent et déterminent le succès d’une fusion diffèrent d’une situation à l’autre et du marché en général. En outre, lorsqu’un fonds d’arbitrage sur fusion renferme entre 35 et 45 différentes ententes, où aucune d’entre elles ne représente plus de 3 % du portefeuille total, on obtient d’autres avantages sur le plan de la diversification. De cette façon, le risque d’échec d’une entente est estompé et ses effets délétères au sein du fonds minimisés. Le fait de dénombrer un nombre optimal d’ententes permet également au gestionnaire de cibler les secteurs où les occasions sont plus attrayantes et où les écarts sont plus prononcés.
Les stratégies d’arbitrage sur fusion qui ont recours à un effet de levier offrent une prime plus élevée pour les risques encourus par rapport aux stratégies qui n’y ont pas recours. Il importe également de considérer le facteur de l’efficacité fiscale, les rendements étant principalement imposés en tant que gains en capital et non comme revenu. Prenons par exemple un rendement de 4 % sur des titres détenus dans un compte imposable (considérant un taux d’imposition marginal de 50 %) qui est remis sous forme de gains en capital, celui-ci équivaut dans les faits à un taux de rendement obligataire de 6 %.
À l’heure actuelle, on note la présence d’occasions intéressantes dans plusieurs secteurs, dont ceux de la technologie, des produits industriels et de la biotechnologie. Les ententes y sont de bonne qualité, de courte durée et assorties d’une probabilité de réussite élevée. Sachant qu’il faut normalement entre trois et cinq mois pour qu’une entente soit menée à bien, cette courte durée permet au fonds de remettre à profit, dans un tout nouvel ensemble d’occasions, les liquidités ainsi générées. Il est fort probable que le marché demeure volatil encore quelque temps, possiblement plus longtemps que ne le voudraient les investisseurs; raison de plus pour avoir recours aux stratégies alternatives et non corrélées comme celle de l’arbitrage sur fusion afin de créer un portefeuille mieux équilibré et plus résilient.