jegas / 123RF Banque d'images

Serait-il possible qu’un retour au jeu soit possible pour les sociétés d’acquisition à vocation spécifique (SAVS), ces entreprises vilipendées « chèques en blanc » dont l’histoire récente est aussi volatile et imprévisible que la santé émotionnelle d’un certain ancien président des États-Unis?

Le secteur des SAVS, qui obtient son financement sur les bourses et dont l’objectif consiste à acquérir des sociétés sur le point de devenir publiques, a été sous les feux de la rampe en mars lorsqu’une société à vocation spéciale, Digital World Acquisition Corp (DWAC), a mené à bien sa fusion avec Trump Media & Technology Group (TMTG). Celle-ci se négocie maintenant sur le NASDAQ avec le symbole DJT.

DWAC a cumulé 250 millions de dollars (M$) lors de son PAPE en septembre 2021 avec le but explicite de cibler les ententes de taille moyenne et les entreprises émergentes de croissance axées sur la technologie en Amérique. Peu de temps après ses débuts en bourse, la SAVS a annoncé en octobre 2021 sa fusion avec TMTG, société qui possède Truth Social, une plateforme alternative technologique de médias sociaux. Dans le cadre d’un long processus complexe ponctué d’extensions multiples, d’accusations de délits d’initiés et d’une enquête de la SAVS par la SEC (qui s’est culminé par une amende payée par la SAVS), la fusion a finalement été approuvée le 22 mars 2024. Depuis le début de l’année, la valeur des actions de DWAC a augmenté de 145 %, ce qui, selon le Financial Times, fait grimper la valeur de TMTG à environ 9 milliards de dollars (G $). En plus du dividende accordé à Trump, trois fonds de couverture participants ont réalisé un profit formidable.

Depuis l’annonce de l’acquisition de TMTG par la SAVS, les actions de DWAC se sont négociées à prime importante par rapport à la valeur fiduciaire, illustrant l’effet halo considérable associé à l’ancien président et l’optionalité inhérente pour les SAVS qui se fusionnent à une société convoitée par les spéculateurs.

AltC Acquisition Corp. (NYSE : ALCC) est une autre SAVS qui se négocie à prime importante par rapport à la valeur fiduciaire. Celle-ci bénéficie du soutien de Sam Altman, fondateur et PDG d’OpenAI, et se prépare à fusionner avec Okla Inc., société qui met au point la prochaine génération de réacteurs nucléaires.

Au fur et à mesure que l’euphorie et la ferveur spéculative retrouvent leur emprise sur le marché, les SAVS appuyées par un promoteur ou qui fusionnent avec des entreprises jouissant d’une notoriété peuvent se négocient à prime élevée. Cela pourrait contribuer à créer un milieu d’investissement favorable pour l’arbitrage sur SAVS, à l’instar de la bulle de 2020/2021.

À part l’engouement dont jouit DJT, l’activité demeure plutôt faiblarde dans le secteur des SAVS. En mars, on a assisté à deux PAPE de SAVS, à 12 ententes de fusion avec SAVS et à cinq cas de liquidation. À la lumière de ces données, on dénombrait à la fin du mois 235 SAVS actives dont 104 étaient à la recherche de cibles.

Notre positionnement à l’égard des SAVS demeure prudent, ciblant les SAVS en voie de liquidation ou de rachat, à la recherche d’un taux de rendement supérieur à 6,5 %. À la fin du premier trimestre, les SAVS en quête de cible se négociaient sous leur valeur fiduciaire, ce qui a dégagé un taux de rendement à l’échéance de 5,80 %. L’arbitrage sur SAVS revient essentiellement à se procurer des bons du Trésor au rabais. Le rendement des SAVS est semblable à celui des obligations de catégorie investissement de sociétés américaines, mais avec un risque de crédit plus faible, une durée plus courte et des avantages fiscaux plus intéressants puisque ces rendements sont essentiellement considérés comme des gains en capital. Suivant le retour de l’euphorie et le regain de PAPE sur le marché, il est possible que des occasions de placements favorables se présentent pour l’arbitrage sur PAPE de SAVS.