Reprenons l’exemple de M. K, un homme de 59 ans divorcé, cette fois actionnaire d’une société de portefeuille dont les actifs se composent essentiellement d’immeubles locatifs et de placements en bourse détenus depuis un bon nombre d’années.

Autrement que dans l’exemple précédent où le décès de ce dernier déclenchait un impôt réputé sur le gain en capital des immeubles et sur la récupération de la déduction pour amortissement, la détention des biens au sein d’une société complexifie la situation pour le décédé et sa succession. Sans planification post-mortem pour cause de délai prolongé, ou de l’impossibilité d’utiliser la stratégie de pipeline, une double imposition risque de se produire. En effet, dans l’évaluation des actions au titre du bilan successoral, les placements mobiliers et immobiliers seront chiffrés à leur juste valeur marchande (JVM) au sein de la société de sorte que le gain en capital réputé de l’actionnaire décédé sera imposé en fonction de cette valeur. Si par la suite il est prévu de puiser les sommes requises pour payer les impôts du décédé à même les actifs de la société, un impôt additionnel sur le dividende versé à cette fin sera exigible, et ce sans compter l’impôt sur la vente des actifs au sein de la société.

Dans l’exemple où le gain en capital se chiffre à 10M$ (JVM 15M$ moins PBR 5M$), l’impôt sur ce gain s’élève à 2 665 000$ (26,65%). Un dividende en provenance de la société de 4 745 370$ sera requis pour payer cet impôt (43,84%, taux d’impôt sur dividende ordinaire). Il s’agit d’un impôt additionnel de 2 080 370$, d’où une double imposition. (Je ne tiens pas compte ici de l’impôt en main remboursable à titre de dividende).

Dans le cas où M. K. détient, par l’entremise de sa société, une police d’assurance-vie permanente dont le capital assuré correspond en gros au montant des impôts latents sur le gain en capital au décès, le produit de la police d’assurance vie moins son cout de base rajusté (CBR) pourra être versé à la succession en franchise d’impôt par le compte de dividende en capital de la société afin de payer les impôts sans avoir à puiser dans les actifs de la société. Mieux encore, l’utilisation du paragraphe 164(6) au moyen de l’assurance vie pourra atténuer, soit le fardeau fiscal du décédé et/ou celui de la succession selon la méthode choisie et le montant de l’assurance vie en vigueur.

Exemple de planification avec une assurance vie de 2 500 000$.

Un rachat de 5M$ d’actions de la société entrainera un dividende en capital de 2,5M$ grâce au produit d’assurance vie (CBR de zéro) et un dividende ordinaire de 2,5M$ imposable à raison de 1 096 000$. Le rachat des actions réduira l’impôt du décédé sur le gain en capital à 1 332 500$. (15M$-5M$PBR-5M$ Rachat=5M$ GEC@26,65%) L’impôt total sur le dividende et le gain en capital atteindra 2 428 500$.

Le patrimoine est mieux protégé grâce à l’assurance vie et ce en tenant compte des primes annuelles de 55 000$ payées tout au long de la durée de la police (espérance de vie de 26 ans) soit 1 195M$ en valeur actualisée.

Sans planification et assurance vie :

15M$ valeur de départ (10 M$ gain en capital).

Moins les impôts sur le gain en capital et le dividende de 4 745 370$

Solde 10 254 630$

Avec planification et assurance vie :

15M$

Réception du produit d’assurance vie de 2 500 000$

Moins les impôts sur le gain en capital et le dividende de 2 428 500$

Moins le cout actualisé de l’assurance vie de 1 195 000$

Solde 13 876 500$

Sans planification et avec assurance vie :

15M$

Réception du produit d’assurance vie 2 665 000$

Moins l’impôt sur le gain en capital de 2 665 000$

Moins le cout actualisé de l’assurance vie 1 238 000$

Solde 13 762 000$

Il va sans dire que le décès peut survenir bien avant l’espérance de vie et réduire ainsi le cout de la police. De plus, la valeur de la société risque d’augmenter et alourdir le passif fiscal dans le temps. Il se peut aussi qu’il y ait des liquidités dans le patrimoine pour payer les impôts sans faire appel immédiatement aux biens de la société. Il n’en demeure pas moins que l’extraction des valeurs de la société demeurera imposable dans le temps. L’assurance vie constitue un moyen efficace de procurer les liquidités au décès dans les sociétés de ce type. Comme je le mentionne souvent, l’accès à cet instrument financier demeure un privilège, car il nécessite une sélection des risques parfois exigeante.