S’il a accumulé de l’actif dans un compte de retraite individuel à report d’impôt (Individual Retirement Account ou « IRA ») et est revenu au Canada, il devra prendre plusieurs précautions s’il souhaite transférer son IRA à un régime enregistré d’épargne-retraite (« REÉR »).
Il devra en effet suivre dans l’ordre les étapes nécessaires pour rompre ses liens avec les États-Unis afin d’éviter que le transfert lui soit fiscalement défavorable. L’actif de son IRA devra être déplacé à son REÉR avant qu’il n’abandonne sa carte verte.
Traitement fiscal américain
Dans l’année du transfert de l’IRA au REÉR
En vertu de la législation américaine, le transfert d’un IRA à un REÉR oblige le contribuable à inclure l’IRA dans sa déclaration de revenus aux États-Unis. Certains régimes de retraite imposent un impôt supplémentaire de 10 % de la juste valeur marchande (« JVM ») des actifs lorsque les comptes sont résiliés avant que le contribuable n’ait atteint l’âge de 59 ans et demi. Au Canada, les contribuables qui ont été l’objet de ces impôts peuvent néanmoins bénéficier du crédit pour impôt étranger (« CIÉ ») au fédéral et dans plus d’une province, dont le Québec.
Dans l’année de l’abandon de la carte verte
Aux États-Unis, un « expatrié couvert » est celui qui, le jour de son expatriation (où il abandonne sa carte verte), détient un « intérêt » dans un IRA (un droit dans la valeur des actifs accumulés à l’IRA), a été résident permanent huit des 15 années précédant ce jour et se trouve dans une des situations suivantes :
- a un actif net de 2 M$ US ou plus aux États-Unis;
- avait un revenu annuel moyen excédant 160 000 $ au cours des cinq dernières années;
- a demandé à bénéficier d’un traité fiscal comme résident d’un autre pays;
- n’a pas fait attester sa situation fiscale par les autorités fiscales.
En principe, l’expatrié couvert est réputé avoir reçu une distribution correspondant à la totalité de son intérêt (à la JVM de l’actif) dans son IRA le jour précédant son expatriation.
Lorsque le résident permanent a déjà transféré son IRA au REÉR au moment d’abandonner sa carte verte, il n’a pas à inclure de montant provenant de l’IRA dans sa déclaration de revenus américaine l’année de l’abandon si elle est ultérieure à l’année du transfert de son IRA puisque le compte n’existe plus aux États-Unis.
En revanche, s’il abandonne sa carte verte avant de transférer son IRA, il sera réputé avoir reçu la JVM de l’actif de l’IRA le jour précédant celui de son expatriation et devra inclure ce montant dans sa déclaration de revenus aux États-Unis. Il n’aura pas à inclure le montant dans sa déclaration de revenus américaine de l’année où il procédera au transfert puisqu’il aura déjà été imposé au moment de l’abandon de sa carte verte.
Traitement fiscal canadien
Dans l’année du transfert de l’IRA au REÉR
Au Canada, aux fins du paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (« L.I.R. »), l’IRA est considéré comme un « mécanisme de retraite étranger » (« MRE »). Rappelons qu’en vertu des lois américaines, lorsque l’IRA est transféré avant l’abandon de la carte verte, un impôt est à payer aux États-Unis au moment du transfert et le contribuable n’est assujetti à aucun impôt dû au compte lorsqu’il abandonne sa carte verte.
Par contre, au Canada, suivant la division 56(1)a)(i)(C.1) L.I.R., le contribuable doit inclure toute somme reçue d’un MRE dans son revenu de l’année du transfert. Il n’a pas à l’inclure si le paiement était exclu du revenu du contribuable aux fins de l’impôt sur le revenu dans le pays où le MRE était établi. En vertu de l’alinéa 60j) L.I.R., il pourra réclamer une déduction équivalant au montant transféré du MRE au REÉR de son revenu de l’année si les sommes :
- n’ont pas été déduites au cours d’une année antérieure;
- correspondent à un montant admissible selon l’article 60.01 L.I.R., c’est-à-dire un paiement visé par la division 56(1)a)(i)(C.1) L.I.R. que le contribuable a reçu au cours de l’année dans le cadre d’un MRE (critère du « montant reçu »);
- sont déjà indiquées dans sa déclaration de revenus canadienne produite pour l’année;
- ne dépassent pas le total des montants qu’il a versés à son REÉR au cours de l’année ou dans les 60 jours suivant la fin d’année.
Dans l’année de l’abandon de la carte verte
Si le contribuable abandonnait sa carte verte avant de transférer son IRA, en vertu du paragraphe 56(12) L.I.R., on présumerait qu’un montant de MRE a été versé au particulier.
En vertu de cette présomption et de la division 56(1)(a)(i)C.1) L.I.R., le contribuable devra inclure la JVM de son IRA dans le calcul de son revenu de l’année de l’abandon. En outre, selon l’alinéa 60j) et l’article 60.01 L.I.R., il ne pourra pas déduire le montant transféré de ses revenus parce que la distribution réputée ne respectera pas le critère du « montant reçu » aux fins de l’article 60.01 L.I.R. De plus, le montant transféré au REÉR réduira d’autant ses droits d’y cotiser.
À certaines conditions, l’impôt payé aux États-Unis pourrait donner lieu au CIÉ au Canada. Tout dépendant de ses revenus, le contribuable pourrait réclamer une déduction REÉR équivalant au montant transféré dans l’année ou par la suite.
Ainsi, à titre d’exemple, un résident canadien détenteur de la carte verte aux États-Unis, qui y aurait travaillé huit ans et aurait accumulé de l’actif d’une valeur de 3 M$ US, qui envisage d’abandonner sa carte verte, puis de transférer son IRA au Canada, pourrait subir des conséquences fiscales désavantageuses.
Ce serait le cas même si les deux événements étaient réalisés au cours de deux années différentes, selon l’interprétation technique 2017-0682301E5 de l’Agence du revenu du Canada (« ARC »). De plus, les conséquences fiscales décrites seraient similaires advenant que le résident canadien soit citoyen américain plutôt que détenteur d’une carte verte. Dans l’interprétation technique 2018-0750411E5, l’ARC indique par ailleurs qu’elle portera la situation à l’attention du ministère des Finances du Canada et que des changements législatifs pourraient être apportés ultérieurement.
Le transfert de l’IRA au REÉR jumelé à l’abandon de la carte verte sont des événements qui peuvent entraîner des conséquences fiscales significatives pour le résident canadien. Pour éviter des surprises, ce dernier devrait consulter un professionnel fiscaliste au préalable.
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Ce texte a été initialement publié par le magazine Conseiller. Ce texte a également été publié dans le magazine Stratège de l’APFF, (Hiver 2019), vol. 24, no 4.