Si certaines devront payer plus d’impôts, d’autres plus chanceuses pourront s’en tirer avec une facture allégée.
1. Taux d’imposition
Les petites entreprises québécoises profitent d’une réduction d’impôt sur les premiers 500 000$ de revenus imposables tirés d’une entreprise exploitée activement.
Le revenu imposable d’une entreprise est essentiellement déterminé par l’addition des revenus bruts moins les dépenses fiscales, incluant les salaires, mais avant les impôts payables par la société et excluant la déduction de tous dividendes payables aux actionnaires.
Pour ce qui est de la notion d’entreprise exploitée activement, notons que les sociétés gagnant un revenu passif (placements, loyers, redevances, etc.) ne se qualifient généralement pas à ce titre. Principalement lorsque la société compte 5 employés ou moins. L’exemption habituelle à cette règle étant une société de gestion détenant un immeuble loué à une société opérante pour des raisons de protection des actifs.
Cette réduction d’impôt, dénommé la déduction accordée aux petites entreprises (« DPE »), avait pour effet de réduire, avant 2016, le taux d’imposition fédéral de 15% à 11% et celui du Québec de 11,9% à 8%. Donc, de façon combinée, une réduction d’impôt de 26.9% à 19%, soit 7.9% jusqu’à concurrence de 39 500$ annuellement.
1.1 Budget du Québec – 17 mars 2016
Pour les années d’imposition débutant le 1er janvier 2017 ou après, les petites entreprises québécoises bénéficieront de la DPE seulement si la somme des heures travaillées par les employés dépasse 5 500 heures, soit l’équivalent d’un peu plus de 3 employés à temps plein.
Rappelons que selon son budget du 26 mars 2015, Québec avait plutôt retenu une formule du maintien de plus de 3 employées à temps plein, mesure qui avait été décriée par plusieurs puisqu’elle affectait directement la rentabilité des entreprises saisonnières et/ou celles employant un grand nombre de travailleurs à temps partiel. Notons également que selon les nouvelles mesures, un employé pourra cumuler un maximum de 40 heures par semaine, ces heures devant être payées, sauf dans le cas d’un actionnaire.
Plusieurs ont identifié cette mesure comme visant particulièrement les médecins. En effet, puisque la plupart ne comptent aucun autre employé qu’eux-mêmes, ils verront leur taux d’imposition du Québec passer de 8 à 11.9%, soit une augmentation de 3.9% sur les premiers 500 000$ de revenus imposables.
1.2 Budget fédéral – 22 mars 2016
À partir du 1er janvier 2017, le taux d’imposition fédéral applicable aux premiers 500 000$ de revenu imposable, tel qu’expliqué ci-haut, passera à 10.5%. Cependant, les réductions de taux supplémentaires prévues par l’ancien gouvernement conservateur pour les années 2017, 2018 et 2019 sont « différées ».
2. Multiplication de la DPE
Dans le budget fédéral du 22 mars 2016, de nouvelles mesures pour limiter la multiplication de la DPE ont été mises de l’avant. Encore une fois, ces mesures visent particulièrement les médecins. En effet, il n’est pas rare de voir un groupe de médecins se réunir sous la forme juridique d’une société de personnes, par exemple une société en nom collectif (« SENC »), pour partager leurs revenus et dépenses. Ce genre d’association ou « pool » a pour objectif de niveler la rémunération et les conditions de travail des médecins associés, par exemple, afin d’attribuer certains bonus aux médecins acceptant des horaires de travail de soir et de week-end, des tâches moins agréables, des vacances hors saison, etc.
Avant le budget 2016, l’agence du revenu du Canada (« ARC ») avait émis plusieurs décisions anticipées à l’effet que les médecins associées d’une SENC n’avaient pas à partager leur DPE entre leurs compagnies respectives. Ainsi, selon la planification la plus commune, chaque médecin incorporait sa compagnie et celle-ci facturait la SENC selon l’entente convenue entre les médecins et ce, peu importe le montant ultimement gagné par l’un ou l’autre des médecins pour les actes qu’il ou elle avait facturé à la Régie de l’assurance maladie du Québec (« RAMQ »). Cette structure permettait de multiplier la DPE et ainsi, chaque médecin incorporé pouvait bénéficier d’un taux d’imposition de 19% sur les premiers 500 000$ de revenus imposables.
Selon les nouvelles règles, en vigueur le 1er janvier 2017, la DPE devra être partagée par toutes les sociétés des médecins associés d’une même société de personnes. Ces mesures s’appliqueront également lorsque l’ « association » s’opère par le biais d’une compagnie plutôt que d’une société de personnes.
Conclusion
Par l’effet combiné des nouvelles mesures fiscales, un médecin incorporé, membre d’une SENC et n’ayant aucun autre employé, verra son taux d’imposition passer de 19% à possiblement 26.4% à partir du 1er janvier 2017.
S’il choisissait de se dissocier de la SENC et facturer directement la RAMQ, ce médecin incorporé serait imposé via sa compagnie à un taux combiné de 22.4%.
Finalement, les plus chanceux respectant toutes les conditions, verront le taux d’imposition de leurs compagnies réduit à 18.5%.