La PME manufacturière fait partie depuis 2014 de la stratégie du gouvernement du Québec pour relancer l’économie de la province. De nombreuses annonces ont été faites depuis ce temps pour réduire leur taux d’impôts et les faire bénéficier de divers avantages fiscaux. En diminuant le fardeau fiscal des PME manufacturières, celles-ci profitent de plus de liquidités qui peuvent servir notamment à investir dans des équipements plus productifs, des technologies innovantes ou dans de la main-d’œuvre qualifiée. En 2018, dans un contexte de pénurie importante de main-d’œuvre, il est essentiel de se rappeler ces avantages.
Qu’est-ce qu’une PME manufacturière?
Les avantages fiscaux les plus intéressants sont offerts aux sociétés privées (dont les actions ne sont pas cotées en bourse) qui sont contrôlées ultimement (généralement par une détention de plus de 50 % des actions votantes et participantes) par des particuliers qui sont des résidents du Canada. Ces sociétés privées sous contrôle canadien (« SPCC ») doivent exploiter activement une entreprise manufacturière et employer de la main-d’œuvre pour un minimum de 5 500 heures rémunérées. De plus, le total des salaires payés à des employés participant activement à des activités de fabrication & transformation (« F&T ») devra représenter au moins 50 % du total des salaires payés dans l’exercice financier à tous les employés de la société.
Les activités de fabrication & transformation
Certains entrepreneurs pourraient exploiter une PME manufacturière… sans le savoir! En effet, la définition d’activités de F&T englobe plusieurs activités qui ne sont pas instinctivement associées à de la F&T.
Il y a tout d’abord la définition générale et acceptée de la F&T. Selon une interprétation de la Loi de l’impôt sur le revenu par l’Agence du revenu du Canada (« ARC »), « la fabrication de biens ou de marchandises implique ordinairement la création de quelque chose […] ou le façonnage, l’estampage ou le formage d’un objet à partir de quelque chose […] ». Pour les activités de transformation, on peut résumer par deux questions dont la réponse doit être positive : 1) est-ce que les biens au centre des activités de la société subissent un changement de forme, d’apparence ou de leurs particularités et 2) les biens sont-ils devenus plus commercialisables?
Il y a aussi d’autres activités qui ne répondent pas à cette définition plus générale, mais qui sont néanmoins considérées comme de la F&T, notamment : la supervision d’activités de F&T (superviseur hiérarchique qui surveille les activités de F&T, superviseur de la ligne de production, contrôle de la qualité et de la production, contrôle de la pollution, etc.), la manipulation de biens (réception et entreposage de matières premières, production et assemblage de biens en cours de transformation, inspection et emballage de produits finis, etc.), certaines activités reliées aux installations servant à la production (conception d’ingénieur et réparation de ces installations, sécurité, nettoyage, chauffage et entretien de ces installations, etc.) et la recherche scientifique.
Il est primordial de consulter un fiscaliste pour s’assurer que les activités d’une PME manufacturière se qualifient à titre d’activités de F&T. Le Folio publié par l’ARC, dont le lien se trouve ici, est aussi une bonne source d’information sur la F&T.
Taux d’impôt du Québec
L’avantage principal pour une PME manufacturière dont plus de 50 % de la main-d’œuvre est rémunérée dans le cadre d’activités de F&T (pour un minimum de 5 500 heures rémunérées à tous les employés) est le bas taux d’impôt provincial de 4 % sur le premier 500 000 $ de revenu imposable. À titre de comparaison, ce taux provincial double pour une SPCC qui n’est pas une PME manufacturière et il se situe à 11,7 % sur tout revenu imposable supérieur à 500 000 $.
Le Québec fait cependant mauvaise figure dans le Canada quant à l’imposition du revenu imposable admissible à la déduction accordée aux petites entreprises (« DAPE »). Ces taux d’imposition réduits s’appliquent sur le premier 500 000 $ de revenu imposable d’une SPCC, tant que le capital imposable de la société et de ses sociétés associées est inférieur à 10 millions de dollars. Le Québec est encore plus restrictif avec son nouveau critère sur les 5 500 heures rémunérées, entré en vigueur pour tous les exercices financiers débutant le ou après le 1er janvier 2017. C’est la seule province à avoir ce critère supplémentaire. De plus, aucune province ou territoire n’a de taux d’imposition plus élevé que le Québec sur le revenu imposable admissible à la DAPE – autre que celui offert aux PME manufacturières.
En effet, le Québec fait piètre figure avec son taux d’impôt de 8 % alors qu’il est de 0 % au Manitoba et inférieur à 2,5 % dans 5 autres provinces et territoires. Même avec son taux d’impôt de 4 % offert aux PME manufacturières, seulement deux provinces ont un taux légèrement plus élevé de 4,5 %, soit l’Ontario et l’Île-du-Prince-Édouard. La moyenne nationale se situe à 2,8 %.
Réduction de la cotisation au Fonds des Services de Santé (« FSS »)
Heureusement, la PME manufacturière peut bénéficier de différents autres avantages fiscaux. Une des charges importantes pour la PME québécoise reste la cotisation au FSS. Cette dépense est calculée en fonction de la masse salariale de la société et de ses sociétés associées. Pour une masse salariale de plus de 5 millions de dollars (M$), le taux est plutôt élevé (4,26 %) et représente une dépense de plus de 200 000 $ lorsque la masse salariale est de 5 M$.
Pour n’importe quelle société, le taux de cotisation au FSS est de 2,30 % pour toute masse salariale de la société et de ses sociétés associées de 1 million de dollars ou moins. Ce taux augmente graduellement jusqu’à 4,26 % lorsque la masse salariale atteint ou dépasse 5 M$.
Pour une PME manufacturière dont plus de 50 % de la main-d’œuvre est rémunérée dans le cadre d’activités de F&T, le taux de cotisation est réduit de 0,8 % lorsque la masse salariale est de 1 M$ ou moins. La réduction est moins importante plus la masse salariale augmente, pour être complètement nulle lorsque la masse salariale atteint 5 M$.
Concrètement, la PME manufacturière pourra économiser entre 8 000 $ et 12 500 $ annuellement si sa masse salariale se situe entre 1 et 4 M$.
Déduction additionnelle pour les frais de transport
Cette mesure fiscale vise à offrir une déduction supplémentaire dans le calcul du revenu imposable à la PME manufacturière établie hors des grandes villes du Québec.
Pour une PME manufacturière dont plus de 50 % de la main-d’œuvre est rémunérée dans le cadre d’activités de F&T effectuées en zone éloignée, cette déduction peut représenter 3 % du revenu brut (maximum de 150 000 $), 5 % du revenu brut (maximum de 350 000 $) ou 10 % du revenu brut (aucun maximum) selon la municipalité dans laquelle la PME manufacturière est établie. Si elle est établie dans une grande ville du Québec, le maximum est établi à 1 % du revenu brut ou 50 000 $, ce qui peut tout de même être considérable.
Crédit d’impôt relatif à l’intégration des technologies de l’information (« TI »)
Ce crédit d’impôt demande un peu plus de travail pour l’entrepreneur, car une attestation auprès d’Investissement Québec est requise, mais il peut donner lieu à un crédit de 50 000 $.
Toute PME manufacturière qui fait l’acquisition d’un progiciel de gestion intégré peut en faire la demande. Concrètement les progiciels de gestion intégrés sont souvent connus sous les termes anglais suivants : Enterprise Resource Planning (ERP), Customer Relationship Management (CRM) ou Supply Chain Management (SCM).
Les frais admissibles, représentant 80 % des dépenses engagées relativement au contrat d’intégration des TI, et faisant l’objet d’une attestation d’Investissement Québec, donnent droit à un crédit de 20 %. Le maximum de frais admissibles est de 250 000 $ (80 % x 312 500 $) pour un crédit d’impôt de 50 000 $ (20 % x 250 000 $).
Crédit d’impôt à l’investissement relatif au matériel de F&T
Ce crédit d’impôt s’applique pour toute PME manufacturière établie hors des grandes villes du Québec qui fait l’acquisition de matériel de F&T ou de matériel informatique servant principalement aux activités de F&T, tant qu’il est acquis neuf.
Le crédit d’impôt peut être équivalent à 8 %, 16 % ou 24 % du coût du bien diminué de 12 500 $, selon la municipalité dans laquelle la PME manufacturière est établie. Le coût du bien inclus tous les frais accessoires comme le transport et l’installation. De plus, la PME manufacturière doit s’assurer d’utiliser le bien rapidement après l’avoir acquis, et ce pour une période minimale de 24 mois.
Déduction pour amortissement additionnelle
Une déduction additionnelle pour amortissement de 35 % est possible lorsque la PME manufacturière fait l’acquisition de matériel de F&T ou de matériel informatique servant principalement aux activités de F&T, tant qu’il est acquis neuf.
Le coût du bien inclus tous les frais accessoires comme le transport et l’installation. De plus, la PME manufacturière doit s’assurer d’utiliser le bien rapidement après l’avoir acquis, et ce pour une période minimale de 24 mois.
Impact pour l’entrepreneur
Un entrepreneur québécois qui exploite sa PME manufacturière hors des grandes villes a droit à plusieurs avantages fiscaux, qui lui permettront d’investir dans sa société, de faire fructifier ses investissements et ultimement d’obtenir plus d’argent dans ses poches. C’est alors que de bons conseils d’investissements deviennent primordiaux, pour protéger le patrimoine familial des entrepreneurs québécois!
Olivier Rénald, CPA, CA
Directeur principal, Certification
Dermers, Beaulne