Julie-Martine Loranger – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com Source de nouvelles du Canada pour les professionnels financiers Wed, 27 Nov 2024 19:33:28 +0000 fr-CA hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.9.3 https://www.finance-investissement.com/wp-content/uploads/sites/2/2018/02/cropped-fav-icon-fi-1-32x32.png Julie-Martine Loranger – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com 32 32 Sanction record de 12,9 millions AUD pour Vanguard https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/sanction-record-de-129-millions-aud-pour-vanguard/ Mon, 16 Dec 2024 11:33:08 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=104309 ZONE EXPERTS - Le régulateur australien s’attaque à l’écoblanchiment

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Le 25 septembre 2024, la Cour fédérale d’Australie a ordonné à Vanguard Investments Australia Ltd (Vanguard) de payer une sanction considérable de 12,9 millions dollars australiens (AUD) (11,9 millions de dollars canadiens — CAD) pour des déclarations contenant de l’information fausse ou trompeuse concernant son Ethically Conscious Global Aggregate Bond Index Fund (le « Fonds ») ainsi que de publier sur son site web un avis de publicité défavorable détaillant ces déclarationsi.

Cette décision fait suite à la première cause initiée par l’Australian Securities and Investments Commission (ASIC) en matière d’écoblanchiment, où la Cour fédérale d’Australie a imposé une sanction de 11,3 millions AUD (10,5 millions CAD) à Mercer Superannuation (Australia) Limited pour des déclarations contenant de l’information fausse ou trompeuse sur l’aspect durable de ses produits d’investissement.

L’ASIC a allégué que Vanguard avait transmis de l’information fausse ou trompeuse du 7 août 2018 au 17 février 2021, en affirmant que le Fonds offrait une occasion d’investissement éthique, qu’une vérification des valeurs mobilières contre des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) était effectuée et que les valeurs mobilières ne respectant pas les critères ESG étaient retirées ou exclues.

Cette information fausse ou trompeuse apparaissait dans les documents d’information du produit (product disclosure statement – PDS) de Vanguard, sur son site web, ainsi que dans une interview et une présentation avec Finance News Network. Vanguard a admis la plupart des allégations de l’ASIC.

Afin de déterminer le montant de la sanction, la Cour fédérale d’Australie a pris en compte certains facteurs aggravants et certains facteurs atténuants pertinents afin de déterminer la pénalité appropriée.

Certains des facteurs considérés par la Cour sont les suivants :

  • Gravité de la conduite trompeuse : Vanguard a développé et fait la promotion du Fonds en réponse à la demande du marché pour des investissements ESG et l’aspect « éthique » du Fonds était sa principale caractéristique. De plus, 74 % des valeurs mobilières du Fonds (en fonction de leurs valeurs marchandes) n’avaient pas été analysées en fonction des critères ESG promis. Bien que la conduite de Vanguard n’ait pas causé de perte financière pour les investisseurs, la Cour fédérale d’Australie a indiqué que la conduite avait le potentiel de leur causer un préjudice en les empêchant d’avoir l’occasion de faire un choix d’investissement correspondant à leurs valeurs.
  • Durée de la conduite trompeuse et l’importance du fonds : La conduite trompeuse s’est poursuivie pendant une période d’environ deux ans et demi et Vanguard gérait 1,1 milliard AUD dans le Fonds qui comptait environ 1000 investisseurs.
  • Le caractère intentionnel de la conduite : Bien que la Cour ait reconnu que la conduite de Vanguard n’était pas intentionnelle, le désir de présenter son Fonds comme « éthiquement soucieux » était plus important que de s’assurer que la composition du Fonds et la vérification des critères ESG étaient correctement communiquées aux investisseurs
  • Implication de cadres supérieurs : Des cadres supérieurs, tels que le responsable des produits, le responsable de la stratégie des produits et le responsable de la gestion des produits, ont participé à l’élaboration des documents d’information continue contenant de l’information fausse ou trompeuse.
  • Autodénonciation et coopération : Lorsque le responsable des risques a pris connaissance du fait que les déclarations des PDS et du site web étaient inexactes, le Fonds a été immédiatement mis en arrêt des opérations. Vanguard a ensuite promptement dénoncé la situation à l’ASIC. De plus, Vanguard a maintenu un haut niveau de coopération tout au long des procédures et de l’enquête de l’ASIC en répondant rapidement aux demandes d’informations et de documents du régulateur. Vanguard a aussi admis pratiquement l’ensemble des allégations de l’ASIC, à l’exception d’une allégation sur la nature et la portée de certaines déclarations. La Cour a accordé à Vanguard une réduction de pénalité de 25% pour souligner sa coopération avec l’ASIC.
  • Améliorations apportées aux procédures de conformité de Vanguard : Lorsque l’information fausse ou trompeuse a été découverte dans le Fonds, Vanguard a procédé à un examen de ses produits d’investissement similaires qui s’appuyaient sur la vérification de critères ESG. De nouvelles politiques et procédures ont également été mises en place pour garantir le respect des obligations d’information continue et ainsi prévenir la transmission d’information fausse ou trompeuse.

Principes clés à retenir

Malgré la coopération de Vanguard avec l’ASIC, la Cour fédérale d’Australie, dans cette instance, a émis une pénalité monétaire importante, représentant un montant équivalant à l’ensemble des profits annuels de Vanguard Investments Australia Ltd et plus de 12 fois le revenu qu’a pu recueillir Vanguard pour la gestion du Fonds, et ce, malgré l’absence de préjudice financier pour les investisseurs.

En remportant deux grandes victoires en matière d’écoblanchiment et en imposant des sanctions civiles record, il appert que l’emphase est mise sur la dissuasion de publier de l’information fausse ou trompeuse sur les investissements ESG.

Au Canada, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont publié des indications concernant leurs attentes à l’égard des fonds d’investissement axés sur l’ESG (voir l’avis 81-334 du personnel des ACVM). Il sera intéressant de voir si les ACVM entameront aussi des poursuites afin de dissuader l’écoblanchiment de la part des gestionnaires de fonds.

Par Me Julie-Martine Loranger, avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Yassine Khadir et Vincent Leduc, respectivement associée, sociétaire et étudiant chez McCarthy Tétrault.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

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Les lignes directrices sur les sanctions de l’OCRI https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/les-lignes-directrices-sur-les-sanctions-de-locri/ Mon, 18 Nov 2024 12:14:25 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=103596 ZONE EXPERTS - Elles ont pour but l’uniformité de traitement, l’équité et la transparence.

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L’organisme canadien de réglementation des investissements (« OCRI ») est l’organisme surveillant les courtiers en placement, les courtiers en épargne collective et les opérations effectuées sur les marchés des titres de capitaux propres et des titres de créance au Canada. Dans le cadre de ses affaires disciplinaires, l’OCRI a publié ses lignes directrices sur les sanctions, qui sont entrées en vigueur le 1er février 2024.

Les buts principaux de ces lignes directrices, selon l’OCRI, sont l’uniformité de traitement, l’équité et la transparence. Elles sont séparées en trois sections : les Principes de détermination des sanctions, les Facteurs clés dans la détermination des sanctions et les autres considérations.

Principes de détermination des sanctions

Les sanctions, pour l’OCRI, sont de nature préventive en premier lieu. Donc, elles doivent être assez sévères afin de décourager une conduite future similaire par l’intimé et d’autres individus à tenir la même conduite. Ainsi, l’OCRI doit s’assurer qu’un contrevenant ne doit pas tirer profit de sa conduite fautive. Ainsi, la sanction doit comprendre une partie ou la totalité des montants qui ont été obtenus en plus d’amendes additionnelles.

Toutefois, il faut aussi que la sanction soit proportionnelle à la gravité de la faute qui a été commise. Elle doit non seulement considérer les facteurs aggravants, mais aussi ceux qui sont atténuants (par exemple, en coopérant de manière proactive avec l’OCRI).

Facteurs clés

Les facteurs clés, qui peuvent être atténuants ou aggravants à la peine, sont nombreux. Nous retenons les suivants, qui donnent une vue d’ensemble de l’intention de l’OCRI lors de l’élaboration de ceux-ci :

– L’étendue de la conduite fautive ;

– La période de la conduite fautive ;

– Les antécédents de l’intimé ;

– Le préjudice causé aux victimes ;

– La vulnérabilité des clients ;

– Les actions de l’intimé avant, pendant et suite à la conduite fautive.

Autres considérations

L’OCRI fait valoir que de nombreux autres facteurs peuvent venir influencer la sanction et non seulement le fait pour les clients d’avoir perdu de l’argent. Exposer son client à un risque de perte financière, même si aucune somme n’a été perdue, peut être un facteur aggravant lors de la détermination de la peine. Il en est de même avec les effets subjectifs qui peuvent être ressentis par les clients, tel que de la détresse émotionnelle, physique ou mentale.

En conclusion, les lignes directrices sur les sanctions publiées par l’OCRI visent à assurer une uniformité de traitement, une équité et une transparence dans les affaires disciplinaires. Elles mettent l’accent sur la prévention en imposant des sanctions suffisamment sévères pour dissuader toute conduite fautive future, tout en veillant à ce que les sanctions soient proportionnelles à la gravité des fautes commises. En tenant compte des facteurs aggravants et atténuants, ainsi que d’autres considérations pertinentes, l’OCRI cherche à protéger les investisseurs et à maintenir l’intégrité des marchés financiers au Canada.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

Avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Yassine Khadir, stagiaire en droit chez McCarthy Tétrault.

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La dissuasion https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/la-dissuasion/ Mon, 21 Oct 2024 11:43:50 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=103594 ZONE EXPERTS - Une mesure appliquée dans l’intérêt public.

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Dans l’affaire Gauthier[1], le Tribunal a, entre autres, imposé une pénalité administrative de 350 000 $ à Philippe Gauthier en concluant que ce dernier, alors qu’il détenait de l’information privilégiée sur Napec :

– a communiqué cette information privilégiée et a recommandé à deux personnes d’effectuer des opérations sur les titres Napec ;

– a recommandé à une troisième personne d’effectuer des opérations sur les titres de Napec.

Quant à Frédéric Racine, le Tribunal impose, entre autres, une pénalité administrative de 250 000 $ et ordonne à ce dernier de remettre à l’Autorité des marchés financiers (l’« Autorité ») la somme de 88 398 $ soit le gain réalisé suite à l’achat d’actions de Napec. Le Tribunal conclut que Frédéric Racine, alors qu’il détenait de l’information privilégiée :

– a effectué des opérations sur les titres de Napec ;

– a recommandé à deux personnes d’effectuer des opérations sur les titres de Napec et a communiqué à l’une d’entre elles de l’information privilégiée.

De plus, le Tribunal prononce les interdictions suivantes pour une période de cinq (5) ans à Philippe Gauthier et à Frédéric Racine :

– interdiction d’effectuer des opérations sur valeurs, sauf pour leur propre compte, et ce à certaines conditions ;

– interdiction d’agir à titre d’administrateur et de dirigeant d’un émetteur assujetti, d’un conseiller et d’un gestionnaire de fonds d’investissement.

Le Tribunal considère que la dissuasion générale est un facteur pertinent dans l’imposition de mesures administratives incluant une pénalité, et ce dans l’intérêt public.

En imposant ces sanctions, le Tribunal est d’avis qu’un message fort doit être transmis puisqu’il s’agit de manquements importants ayant de graves conséquences. Ces manquements minent la confiance des investisseurs dans les marchés financiers et nuisent au bon fonctionnement de ceux-ci. En effet, le bon fonctionnement des marchés financiers présuppose que ceux qui transigent sont à égalité et détiennent la même information en même temps.

Quant à la remise à l’Autorité par Frédéric Racine du gain de 88 398,16 $ en raison de l’achat d’actions de Napec, le Tribunal souligne la gravité des manquements commis. Une telle remise n’est pas une pénalité administrative, mais plutôt une mesure prononcée, et ce, dans l’intérêt public afin que la situation soit redressée.

Les pénalités et interdictions imposées sont donc dissuasives afin de s’assurer de la prise au sérieux des interdictions d’usage d’informations privilégiées.

« De plus, un message fort doit être envoyé que le “tuyautage” n’est pas un jeu permis dans le marché où tous devraient être sur le même pied d’égalité. Une telle pratique perdure encore aujourd’hui et elle ne saurait être tolérée »[2]

* Avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] Autorité des Marchés Financiers G. Gauthier, 2024 QCTMF

[2] Autorité des Marchés Financiers G. Gauthier, 2024 QCTMF 26, paragraphe 313

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Sommaire des activités de surveillance et de réglementation https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/sommaire-des-activites-de-surveillance-et-de-reglementation/ Mon, 22 Jul 2024 11:50:10 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=101743 ZONE EXPERTS – Tel que signalé par l’AMF.

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En mai 2024, l’Autorité des Marchés Financiers du Québec (l’ « AMF ») publiait son sommaire des activités de surveillance et de réglementation de la Direction principale du financement des sociétés (« DPFS »). La DPFS surveille l’application des exigences légales des entreprises qui sont soumises aux obligations d’information continue et des prospectus.

Le premier point d’attention que souligne l’AMF est la détermination du montant d’un placement par prospectus. En effet, l’AMF met le point sur le fait que certains émetteurs indiquent une valeur en dollar déraisonnable compte tenu de leur situation spécifique. Par exemple, l’AMF pourrait demander à une société qui projette d’effectuer un placement par prospectus de 50 millions de dollars (M$), alors que sa capitalisation boursière est aussi de 50 M$, de justifier ce montant très élevé. Si les explications ne sont pas satisfaisantes, l’AMF pourrait intervenir afin de réduire cette valeur du placement.

L’AMF effectue aussi un rappel général quant aux délais des demandes de dispenses. Plusieurs dispenses, telles que la dispense d’établir des documents en français ou l’interdiction d’opérations limitée aux dirigeants, sont souvent effectuées en retard.

Au cours de la dernière année, l’AMF a remarqué plusieurs cas de diffusion d’information de nature technique ou scientifique par des sociétés minières qui n’étaient pas conformes avec la réglementation à ce sujet. En effet, pour publier cette information, les sociétés minières doivent indiquer le nom d’une des personnes qualifiées et la nature de sa relation avec la société. Cette personne doit être soit un ingénieur, soit un géoscientifique de niveau universitaire ou équivalent. De plus, lorsqu’un rapport technique est déposé en vertu de certaines dispositions spécifiques, tel que le dépôt d’un prospectus provisoire, il est nécessaire de respecter les règles d’indépendance de la personne qualifiée.

En ce qui concerne les assemblées annuelles virtuelles, l’AMF conseille aux sociétés de communiquer de manière claire et exhaustive la façon dont un actionnaire peut participer aux assemblées annuelles virtuelles, ainsi que la manière dont l’actionnaire peut exercer ses droits. Il est fortement encouragé de simplifier le processus d’inscription et d’authentification afin de faciliter la participation des actionnaires. Cette remarque fait suite à la préoccupation de plusieurs actionnaires qui continuent de soulever des inquiétudes quant au respect de leur droit lorsque les assemblées annuelles sont virtuelles.

L’AMF rappelle que pour satisfaire aux indications réglementaires, il faut mettre en évidence le fait que le flux de trésorerie est négatif, si c’est le cas, et que la société doit mettre en évidence des faits tels que le taux d’épuisement des liquidités ou les dettes importantes qui arrivent à échéance à court terme. En effet, l’AMF soulève que de nombreuses sociétés omettent de bien décrire les enjeux relatifs à leur situation financière dans leurs prospectus. Cela est d’autant plus important, car l’information de ce type est très utile afin d’informer les investisseurs des risques importants auxquels la société est exposée et, ainsi, permet à l’investisseur de prendre une décision d’investissement informée.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

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Les ACVM appellent à la vigilance https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/les-acvm-appellent-a-la-vigilance/ Mon, 13 May 2024 11:37:33 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=100325 ZONE EXPERTS - Face à la hausse de la fraude à l’investissement.

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Mars étant le mois de la prévention de la fraude, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont invité à ce moment les Canadiens à être prudents en raison de la hausse de la fraude à l’investissement.[1]

Au Canada, la fraude à l’investissement connaît une hausse qui est due en partie à l’utilisation de moyens technologiques de plus en plus sophistiqués par les fraudeurs. Par exemple, la popularité grandissante des cryptomonnaies, qui sont de nouveaux produits souvent peu compris par les investisseurs et qui s’avèrent être un investissement risqué. En effet, la nature décentralisée et anonyme des cryptomonnaies permet plus facilement à des fraudeurs d’agir sans être identifiés et empêche les fonds volés d’être suivis.

Les ACVM rappellent l’existence de plusieurs outils qui sont à la disposition des Canadiens. C’est le cas par exemple du Moteur de recherche national de renseignements sur l’inscription. Il permet de vérifier si la société ou l’individu qui agit comme conseiller ou courtier en valeurs mobilières est bel et bien inscrit auprès d’une autorité en valeurs mobilières. Il est aussi possible de consulter la liste des personnes sanctionnées et les interdictions d’opérations consolidées sur la base de données SEDAR+, ainsi que la liste des mises en garde publiées par les membres des ACVM.

Les ACVM apportent une attention particulière au marché des cryptoactifs. À ce titre, elles rappellent qu’il est préférable pour les Canadiens d’utiliser des plateformes de négociation de cryptoactifs inscrites auprès des autorités. Les plateformes non inscrites présentent des risques plus élevés, n’étant pas conformes à la législation canadienne en valeurs mobilières, qui requiert notamment des mesures de protection particulières pour les investisseurs, une restriction des types de cryptoactifs négociés et une gestion de risque accrue[2]. Néanmoins, bien qu’il existe des plateformes inscrites, les ACVM notent que les cryptoactifs restent des investissements comportant des risques élevés pour les investisseurs.

Effectivement, selon les ACVM, bien qu’un placement sans risque n’existe pas, cela est d’autant plus vrai pour les cryptoactifs. Ceux-ci sont soumis à une volatilité beaucoup plus grande que dans les marchés de valeurs régulières, car les cours des cryptoactifs montent et descendent de manière fulgurante, et ce, souvent à cause de l’influence des médias sociaux. De plus, la cybersécurité est un enjeu d’autant plus important lorsqu’on aborde les cryptoactifs, car les risques de piratage sont accrus. Enfin, les plateformes de négociation de cryptoactifs peuvent restreindre ou suspendre les opérations de négociations ou les retraits d’un compte ce qui accroît le risque que l’investissement en cryptoactifs devienne non-liquide.

À titre de conseils généraux, les ACVM recommandent aux investisseurs canadiens de prendre les mesures qui suivent :

  • Vérifier les sources d’information
  • Travailler avec des sociétés et des professionnels inscrits
  • Se méfier des tactiques frauduleuses courantes telles que des promesses de rendements élevés ou garantis, des incitations à prendre une décision rapide pour des occasions d’investissement uniques, une demande d’accès aux appareils électroniques, ou une occasion de récupérer ses pertes.

Plus particulièrement, les ACVM notent que les Canadiens devraient s’informer et bien comprendre les types de placement qu’ils considèrent faire. Connaître ses besoins financiers, son profil d’investisseur, sa tolérance au risque ainsi que ses objectifs d’investissement permettent de prendre des décisions plus éclairées et de réduire les risques.

Enfin, en mars 2024, les ACVM ont dévoilé une nouvelle campagne visant à sensibiliser le public à la multiplication de recommandations d’investissement inexactes, mensongères ou frauduleuses, soulignant ainsi leur engagement envers la lutte contre la fraude financière.

Par Me Julie-Martine Loranger, avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., et Me Pierre-Gabriel Grégoire CPA et avocat chez McCarthy Tétrault, avec la collaboration de Yassine Khadir, stagiaire en droit chez McCarthy Tétrault.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] L’avis daté du 7 mars 2024 par les ACVM est publié ici : https://www.autorites-valeurs-mobilieres.ca/nouvelles/les-canadiens-sont-invites-a-jouer-de-prudence-devant-la-hausse-de-la-fraude-a-linvestissement/

[2] Pour plus d’information à ce sujet, voir : https://www.autorites-valeurs-mobilieres.ca/plateformes-de-negociation-de-cryptoactifs-mesures-reglementaires-et-dapplication-de-la-loi/

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Ligne directrice sur la gestion des risques liés aux changements climatiques https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/ligne-directrice-sur-la-gestion-des-risques-lies-aux-changements-climatiques/ Mon, 18 Mar 2024 10:19:30 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=99113 ZONE EXPERTS - Traitement équitable des clients.

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Le 30 novembre 2023, pour fin de consultation publique, l’Autorité des marchés financiers (« L’Autorité ») a publié son projet de ligne directrice sur la gestion des risques liés aux changements climatiques (« ligne directrice »).

L’objectif de la ligne directrice est de renforcer la résilience des institutions financières québécoises et du secteur financier dans son ensemble face à l’accroissement des risques reliés aux changements climatiques, et à l’incertitude liée à ces changements et à ces risques.

La ligne directrice s’applique aux assureurs agréés, aux coopératives de services financiers (caisses), aux sociétés de fiducie autorisées et aux institutions de dépôts autorisées.

L’Autorité met de l’avant plusieurs catégories d’attentes sur lesquelles la ligne directrice repose. L’Autorité énumère, entre autres, ses attentes en matière de :

  • Gouvernance;
  • Gestion intégrée des risques;
  • Scénarios climatiques et simulation de crise;
  • Suffisance du capital et des liquidités;
  • Traitement équitable des clients;
  • Communication d’informations financières sur les risques liés aux changements climatiques.

Le présent article couvre de façon succincte, sommaire et non exhaustive certaines des attentes de l’Autorité en matière de traitement équitable des clients.

Entre autres, l’Autorité attend de l’institution financière qu’elle tienne compte du traitement équitable des clients dans le cycle de vie de ses produits dans la perspective des risques liés aux changements climatiques. À cet effet, une attention particulière doit être accordée aux intérêts et besoins du client, notamment en ce qui trait à la conception, au processus de souscription, à la commercialisation et à la publicité relative aux produits.

La conception du produit, fait par une équipe compétente, devrait s’appuyer sur les besoins et les intérêts du client, tout en étant adaptée à l’évolution des risques liés aux changements climatiques. La documentation, accompagnant le produit offert, devra être adaptée au degré de littératie financière du groupe de clients ciblés.

Au niveau de la commercialisation des produits, l’institution financière devrait s’assurer que ladite commercialisation soit effectuée par des personnes formées pour comprendre les caractéristiques des produits et liée aux changements climatiques et aux événements climatiques violents, ainsi que leur incidence sur les groupes de clients ciblés.

L’institution financière devra, avant de diffuser une publicité relative à un produit, s’assurer que la publicité est claire, exacte et non trompeuse en ce qui a trait aux risques liés aux changements climatiques associés au produit.

Quant à l’information destinée aux clients relativement aux risques liés aux changements climatiques, l’Autorité s’attend à ce que cette information soit transmise avant, au moment ou après l’achat de produits financiers. Cette approche contextuelle impliquera des explications détaillées de la part des institutions financières et de leurs intermédiaires vendeurs afin de permettre aux clients de comprendre le produit et de déterminer si ledit produit répond à leurs besoins et correspond à leur tolérance aux risques climatiques.

Par Me Julie Martine Loranger, Ad.E., Me Sonia Struthers et Sheema Rezaei.

Julie-Martine Loranger est avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L.

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Développements récents en valeurs mobilières – partie 1 https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/developpements-recents-en-valeurs-mobilieres-partie-1/ Mon, 19 Feb 2024 11:07:40 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=99105 ZONE EXPERTS- Précisions sur la notion de changement important

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Deux décisions récentes relatives à des recours collectifs en matière de valeurs mobilières fournissent des indications aux émetteurs assujettis sur la façon de juger si un changement dans leurs affaires est suffisamment important pour nécessiter d’être communiqué au public et aux investisseurs rapidement. Ce premier article couvre la décision Markowich[1] de la Cour d’appel de l’Ontario. Dans un article subséquent, nous présenterons la décision Peters[2] de la même Cour.

En règle générale, les émetteurs publics au Canada doivent informer le public lorsqu’ils font face à un changement important dans leurs activités commerciales, leur exploitation ou leur capital si ce changement peut avoir un impact significatif sur la valeur de leurs actions. Les tribunaux canadiens ont élaboré un test en deux parties pour déterminer s’il y a un « changement important ».

Premièrement, ils regardent la nature du changement. Est-il dans l’activité, le fonctionnement ou le capital de la compagnie? À ce stade, on n’évalue pas l’ampleur ou l’effet que ce changement peut avoir. Si la réponse est oui, alors les tribunaux regarderont dans un deuxième temps si le changement est suffisamment important au point que l’on puisse raisonnablement s’attendre à ce qu’il ait un effet matériel sur la valeur des actions de la compagnie. Si c’est le cas, alors le changement sera considéré suffisamment important pour nécessiter une divulgation au public rapide.

Dans l’affaire Markowich, le plaignant a demandé l’autorisation d’intenter une action collective contre Lundin Mining Corporation (« Lundin ») pour avoir omis de divulguer sa découverte d’une instabilité des parois de la fosse et d’un éboulement subséquent dans l’une de ses mines à ciel ouvert au Chili.

Lundin a détecté l’instabilité potentielle de la paroi de la fosse en 2012, avant d’acquérir sa participation dans la mine. À la fin d’octobre 2017, l’équipement de surveillance a détecté cette instabilité et le personnel a été évacué de cette zone de la mine. Quelques jours plus tard, un éboulement est survenu ce qui a restreint l’accès à la mine.

Lundin a divulgué ces événements pour la première fois à la fin du mois de novembre 2017, dans un communiqué de presse, indiquant que ces événements avaient eu un impact sur les prévisions de production pour 2018 et 2019. L’estimation de la production de cuivre pour 2018 était inférieure de 20 % à ce qui avait été annoncé précédemment. Le lendemain, la valeur de l’action de Lundin a chuté de 16 % à la Bourse de Toronto.

En première instance, la Cour supérieure de l’Ontario a rejeté la demande d’autorisation d’intenter une action collective. Le juge de première instance a conclu que, pour déterminer qu’un changement important s’est produit, le tribunal doit être convaincu que l’événement en question entraîne une « position, trajectoire ou direction différente pour les activités commerciales, les opérations ou le capital d’une entreprise »[3]. Il a ensuite examiné les définitions distinctes des termes « activités commerciales », « opérations » et « capital ». En adoptant ce raisonnement, le juge de première instance a conclu qu’il n’y avait aucun changement dans les activités commerciales, les opérations ou le capital de Lundin, car ni l’instabilité du mur de la fosse ni l’éboulement n’ont modifié ce que fait Lundin ou compromis la viabilité de son activité minière. Il était cependant convaincu que, si ces événements constituaient un tel changement, ils « auraient raisonnablement été susceptibles d’avoir un effet significatif sur la valeur des titres de l’émetteur »[4].

La décision de première instance a été subséquemment appelée. La Cour d’appel a, pour sa part, décidé que le changement se qualifiait dans une des catégories de changement nécessitant une divulgation. La Cour d’appel note que les tribunaux doivent appliquer une « approche généreuse » pour interpréter ce qui constitue un « changement important » en vertu de la loi sur les valeurs mobilières de l’Ontario.

L’une des seules restrictions à la signification de « changement » est qu’il doit se produire au sein de la compagnie. Un changement important peut résulter de facteurs externes, mais ces facteurs ne seront considérés comme des changements importants que s’ils entraînent également un changement interne dans les activités, l’exploitation ou le capital de la compagnie, et si ce changement est également important. La fermeture de l’exploitation minière à ciel ouvert pendant une période et la réduction de la production prévue étaient suffisantes pour être considérées comme un changement important dans les opérations de Lundin.

Cette décision fait présentement l’objet d’une requête pour permission d’en appeler à la Cour Suprême du Canada.

Par Me Julie Martine Loranger, Ad.E., et et Pierre-Gabriel Gregoire, associés chez McCarthy Tétrault, avec la collaboration de Karolina Kasparov, étudiante en droit chez McCarthy Tétrault.

Julie-Martine Loranger est avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L.,

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] Markowich v. Lundin Mining Corporation, 2023 ONCA 359. [Markowich]

[2] Peters v. SNC-Lavalin Group Inc., 2023 ONCA 360. [Peters]

[3] Markowich at para 59

[4] Markowich at para 60.

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L’affaire Sharp c. Autorité des marchés financiers https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/laffaire-sharp-c-autorite-des-marches-financiers/ Mon, 29 Jan 2024 11:31:25 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=98603 ZONE EXPERTS – Un examen de l’applicabilité constitutionnelle du TAMF et du régime de valeurs mobilières du Québec aux résidents de l’extérieur de la province.

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Contexte

En 2017, l’Autorité des marchés financiers du Québec (l’« AMF »), organisme de réglementation du secteur financier de la province, a intenté une action contre quatre résidents de la Colombie-Britannique pour leur participation présumée à des stratagèmes transactionnels de manipulation de titres de type « gonflage et largage »[1]. L’AMF a allégué que les défendeurs ont fait la promotion de leur société fictive et lui ont donné une « apparence » légitime au moyen de communiqués de presse trompeurs et d’autres activités de commercialisation alors que, en réalité, la société était essentiellement inactive. Ces activités ont par la suite gonflé le cours des actions de la société. Les défendeurs ont vendu leurs actions et ont réalisé un profit de plus de 2,6 millions de dollars.

Bien que les défendeurs résidaient en Colombie-Britannique, leur stratagème avait plusieurs liens avec le Québec : la société fictive était un émetteur assujetti au Québec ayant une adresse d’affaires à Montréal et avait, à un certain moment, un administrateur qui était résident du Québec, ses activités promotionnelles étaient accessibles aux résidents du Québec et quinze investisseurs du Québec ont perdu un montant combiné de 5 000 $. En raison de ce lien géographique, l’AMF a intenté son action devant le Tribunal administratif des marchés financiers (le « TAMF »), alléguant que les défendeurs ont violé la Loi sur les valeurs mobilières du Québec en influençant de façon abusive ou frauduleuse la valeur des titres et en participant sciemment à des opérations sur des titres qui ont créé un prix artificiel.

Ces incidences sur le plan de la compétence allaient constituer le point central de désaccord entre l’AMF et les défendeurs, ce qui a amené des tribunaux de divers niveaux à examiner l’applicabilité constitutionnelle du TAMF et du régime de valeurs mobilières du Québec aux résidents de l’extérieur de la province.

Lien réel et substantiel

Outre les nombreuses dispositions législatives analysées, le critère du « lien réel et substantiel » ou du « lien suffisant », tel que développé dans l’arrêt Unifund Assurance Co. c. Insurance Corp. of British Columbia[2] est utilisé pour examiner l’application et la portée de la législation provinciale « par l’appréciation du caractère suffisant du lien entre le ressort ayant légiféré, l’objet du texte de loi et l’individu ou l’entité que l’on cherche à régir »,[3] le tout sous réserve des principes d’ordre et d’équité.

Historique judiciaire

L’AMF a présenté un acte introductif devant le TAMF alléguant que les défendeurs avaient contrevenu à la Loi sur les valeurs mobilières. Les défendeurs ont à leur tour contesté la compétence du TAMF à l’égard de leur cause, puisqu’ils résidaient à l’extérieur de la province. Le TAMF a rejeté les requêtes en exception déclinatoire présentées par les défendeurs, déclarant que le TAMF avait compétence en vertu des dispositions de la Loi sur l’AMF.

Il est important de noter que les décisions prises lors de la requête en exception déclinatoire et toutes les décisions judiciaires subséquentes n’ont pas statué sur le fond de l’affaire, mais ont demandé si l’affaire relevait de la compétence du TAMF. Il a fallu pour cela définir la portée territoriale et l’applicabilité constitutionnelle du régime québécois des valeurs mobilières.

Les défendeurs ont déposé une demande de contrôle judiciaire, qui a été rejetée par la Cour supérieure du Québec. En appel, la Cour d’appel du Québec (« Cour dappel ») a confirmé la compétence du TAMF, mais était divisée sur les motifs de cette décision. Les juges majoritaires ont conclu qu’il existait un lien réel et substantiel entre le Québec et les appelants selon le critère de l’arrêt Unifund. Les défendeurs ont interjeté appel de la décision devant la Cour suprême du Canada (la « Cour suprême »).

Décision de la Cour suprême

Les juges majoritaires de la Cour suprême ont rejeté l’appel dans un jugement rendu le 17 novembre 2023, estimant que l’AMF avait raison d’étendre sa compétence aux appelants de l’extérieur de la province. En interprétant les dispositions relatives à la compétence de la législation en valeurs mobilières du Québec au moyen du critère de l’arrêt Unifund, la Cour suprême a conclu qu’il existait un « lien réel et substantiel » suffisant entre les défendeurs et la province pour que le TAMF étende sa compétence. La Cour a également noté que, bien que le critère de l’arrêt Unifund fasse partie de la famille de critères de « lien réel et substantiel » qui ont été utilisés dans une variété d’affaires, son interprétation dépend largement des faits uniques de l’affaire et, par conséquent, son utilisation variera en fonction du contexte.

Le critère de l’arrêt Unifund a été appliqué en deux étapes. Premièrement, la Cour suprême s’est interrogée sur l’existence d’un lien suffisant entre le Québec et les appelants. Elle a répondu par l’affirmative; les allégations selon lesquelles les appelants se sont servis du Québec comme « façade » de leur stratagème et ont causé un préjudice aux investisseurs du Québec étaient suffisantes pour établir ce lien.

Deuxièmement, la conclusion d’un « lien réel et substantiel » était assujettie aux règles d’ordre et d’équité, qui tiennent également compte de la courtoisie interprovinciale. La Cour suprême a, entre autres, déclaré qu’il était nécessaire d’adopter une approche souple pour appliquer ces principes dans le contexte des valeurs mobilières, étant donné que la manipulation de titres et la fraude contemporaines en valeurs mobilières n’ont pas de frontières. La Cour suprême a conclu que l’application de la loi du Québec aux défendeurs était en effet équitable et qu’elle n’était pas contraire au principe d’ordre ou à la notion de courtoisie interprovinciale. En fait, il serait contraire à l’objectif visé par la nature transfrontalière de la réglementation moderne des valeurs mobilières de permettre aux défendeurs d’échapper à la portée réglementaire québécoise, car c’est bien la nature de la réglementation moderne des valeurs mobilières que de permettre aux provinces de poursuivre des non-résidents.

Julie-Martine Loranger est avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L.,

Par Me Julie Martine Loranger, Ad.E., et Me Sonia Struthers, associées chez McCarthy Tétrault, avec la collaboration Me Sheema Rezaei, sociétaire chez McCarthy Tétrault. Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] 2023 CSC 29 [Sharp c. AMF].

[2] 2003 CSC 40, [2003] 2 R.C.S. 63.

[3] Sharp c. AMF, par. 102.

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Les obligations des fiduciaires de fonds d’investissement https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/les-obligations-des-fiduciaires-de-fonds-dinvestissement/ Mon, 13 Nov 2023 05:13:00 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=97320 ZONE EXPERTS - Une cause vient en préciser le fonctionnement.

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Dans l’affaire Turpin c. TD ­Asset ­Management1, le demandeur alléguait que ­TD ­Asset ­Management inc. (TDAM), un gestionnaire de portefeuilles de fonds, ne prenait pas de décisions d’investissement actives et tentait simplement de suivre l’indice de référence d’un fonds, soit d’employer une stratégie dite d’« indexation passive » (closet indexing). Ainsi, le demandeur faisait valoir d’une part, que TDAM se devait de divulguer cette stratégie, et d’autre part, que ­TDAM facturait des frais de gestion trop élevés pour le service de gestion rendu. Le tribunal s’est prononcé en faveur de la défenderesse, TDAM. Le tribunal a trouvé que le fonds en question, le ­Canadian ­Equity ­Fund (CEF), avait été géré de manière active avec l’objectif de surpasser l’indice de référence et que les frais de gestion étaient raisonnables.

Cette décision de la ­Cour de la ­Colombie-Britannique est intéressante pour plusieurs raisons. Entre autres, il s’agit de la première décision au ­Canada qui vient préciser le fonctionnement des devoirs fiduciaires dans le contexte particulier des gestionnaires de fonds communs de placement. Ce sujet est abordé dans le présent article. Ensuite, nous examinerons dans un article subséquent les conclusions de la Cour de la ­Colombie-Britannique sur les stratégies d’investissement de ­TDAM.

Les gestionnaires de portefeuilles se doivent d’être transparents quant à leur rémunération

Dans ­l’affaire Turpin, le tribunal devait déterminer si la rémunération du gestionnaire était raisonnable. L’un des arguments du demandeur était que la rémunération du gestionnaire n’était pas raisonnable eu égard à la stratégie d’investissement d’« indexation passive » alléguée. Le demandeur soumettait que les frais de gestion perçus par TDAM étaient déraisonnables par rapport à ceux facturés par des gestionnaires appliquant cette stratégie. Or, la ­Cour a trouvé que le gestionnaire avait activement géré le portefeuille et qu’il n’y avait pas de preuve démontrant que cette rémunération était déraisonnable.

Dans ­Turpin, la ­Cour précise que ­TDAM a respecté ses obligations fiduciaires quant à la divulgation envers les porteurs de parts puisque les frais de gestion ainsi que le rôle de ­TDAM comme fiduciaire et gestionnaire étaient inscrits dans l’acte de fiducie. De plus, la divulgation publique d’information continue de ­TDAM était conforme à la réglementation applicable en valeurs mobilières. Les frais et les méthodes de calculs de ces frais étaient spécifiés, non seulement dans l’acte de fiducie, mais aussi dans le prospectus simplifié et le document d’aperçu du fonds (Fund ­Facts). Il est donc important de bien indiquer la rémunération des gestionnaires dans les documents d’information distribués aux investisseurs.

Le devoir de surveillance lorsque le fiduciaire porte deux chapeaux

La ­Cour explique qu’un fiduciaire qui délègue la gestion d’un fonds à un gestionnaire indépendant doit le superviser en tenant compte de la norme de prudence et diligence énoncée dans l’acte de fiducie. De plus, le fiduciaire doit surveiller de manière continue que le gestionnaire indépendant s’acquitte de ses obligations professionnelles, qu’il gère le fonds selon les objectifs de celui-ci et que les frais de gestion sont raisonnables.

Dans le cas ici présent, le fait que ­TDAM avait à la fois le rôle de fiduciaire et de gestionnaire ne devait pas placer les bénéficiaires, soit les porteurs de parts, dans une position moins favorable que si ­TDAM avait délégué la gestion à un gestionnaire indépendant. En d’autres termes, l’obligation fiduciaire de TDAM de superviser la gestion des actifs du fonds n’est pas touchée par le fait qu’elle agit comme fiduciaire et gestionnaire en même temps.

Les devoirs fiduciaires doivent être interprétés dans leur contexte

Il faut retenir de la décision ­Turpin que les devoirs du fiduciaire d’un fonds commun de placement doivent être analysés et déterminés avec égard au contexte commercial dans lequel ils s’inscrivent. Ce contexte est particulier puisque ces fiducies fonctionnent dans un environnement hautement réglementé en matière de droit des valeurs mobilières, conçu pour protéger les investisseurs. Entre autres, la ­Cour affirme que l’obligation fiduciaire de ­TDAM envers le fonds est une obligation fiduciaire envers les porteurs de parts dans l’ensemble et non envers un porteur de parts en particulier.

Les conclusions de la ­Cour

En conclusion, la décision ­Turpin rappelle l’importance de divulguer l’information, dont la rémunération du gestionnaire, dans les documents accessibles au public. De plus, la ­Cour y clarifie certains des devoirs fiduciaires du gestionnaire de fonds communs de placement et émet un principe d’interprétation de ces devoirs avec égard au contexte commercial dans lesquels ils s’inscrivent.

Dans un prochain article à venir, nous aborderons les conclusions de la ­Cour en ce qui concerne les décisions d’investissement des gestionnaires de portefeuille

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L’affaire Lavoie : quand l’AMF punit deux fois https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/laffaire-lavoie-quand-lamf-punit-deux-fois/ Mon, 02 Oct 2023 09:44:13 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=96476 ZONE EXPERTS - La Charte québécoise protège-t-elle contre la double sanction administrative?

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La Charte des droits et libertés de la personne du Québec (la « Charte québécoise ») interdit à l’État de sanctionner une personne deux fois pour la même infraction. Autrement dit, si une personne a déjà purgé, par exemple, une peine de prison pour une infraction donnée, elle ne pourra pas être envoyée en prison de nouveau pour le même geste. Une fois la sentence purgée, on estime que le contrevenant a rendu ses comptes à la société. Le dossier est clos. L’infraction est « expiée ».

Qu’en est-il toutefois du cumul des sanctions administratives pour un même manquement réglementaire? Est-il interdit par la Charte québécoise, au même titre que le cumul des sanctions criminelles et pénales?

C’est qu’au-delà des sanctions pénales et criminelles, il existe aussi des sanctions dites « administratives », lesquelles peuvent prendre plusieurs formes – pécuniaires, disciplinaires, réglementaires, pour ne nommer que celles-là. Tandis que les procédures pénales et criminelles visent à promouvoir l’ordre public, les procédures administratives visent principalement à promouvoir l’observation de règles de conduite dans des domaines plus précis, par exemple des domaines professionnels. C’est pourquoi les tribunaux considèrent que les accusations pénales, en théorie, entraînent une stigmatisation plus importante que les procédures administratives. Nous disons bien « en théorie ». En pratique, bien que seules les infractions criminelles donnent lieu à un casier judiciaire, de plus en plus de régulateurs publient les sanctions administratives dans des registres accessibles en ligne.

L’honorable Clément Samson, juge de la Cour supérieure du Québec, répond à ces questions par l’affirmative dans Lavoie c. Autorité des marchés financiers[1].

L’affaire concerne un courtier hypothécaire qui avait déjà été sanctionné par le Comité de discipline de l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (« OACIQ ») pour des manquements aux normes de la profession, dont celles relatives aux conflits d’intérêts et à la publicité trompeuse. Au terme de ses procédures, l’OACIQ avait infligé à Lavoie des sanctions pécuniaires ainsi qu’une suspension de son permis de courtier hypothécaire, sanctions dont Lavoie s’est acquitté.

Or, les gestes reprochés à Lavoie devant le Comité de discipline de l’OACIQ ont refait surface lorsque Lavoie a présenté à l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») une demande de renouvellement de son permis de courtier. Après un long délai d’attente, l’AMF a renouvelé le permis, tout en l’assortissant de conditions et de restrictions sur la base des mêmes manquements qui avaient fait l’objet des procédures et des sanctions de l’OACIQ.

Lavoie a contesté devant la Cour supérieure du Québec ce qu’il considérait être une double sanction interdite. Il a argumenté qu’il avait déjà été puni pour ses gestes et qu’il était injuste de le punir à nouveau. Il a invoqué l’interdiction de la Charte québécoise contre le cumul des sanctions, même si cette protection est traditionnellement appliquée au cumul de procédures pénales et criminelles.

Dans sa décision, le juge Samson constate d’abord que la Charte québécoise, contrairement à la Charte canadienne des droits et libertés, ne limite pas l’interdiction du cumul des sanctions au domaine criminel. Au contraire, remarque-t-il, les termes employés par la Charte québécoise sont plus larges et, partant, englobent également les sanctions de nature administrative, comme les sanctions disciplinaires. Il conclut donc que la Charte québécoise peut également, dans certains cas, interdire le cumul des sanctions en dehors du contexte criminel.

Encore faut-il que les sanctions soient de même nature et visent les mêmes objectifs. En l’occurrence, le juge Samson estime que l’OACIQ et l’AMF poursuivaient toutes deux le même objectif par leurs sanctions respectives, soit la protection du public. Il était donc déraisonnable pour l’AMF de sanctionner derechef un courtier pour des manquements pour lesquels Lavoie avait déjà été sanctionné par l’OACIQ.

Cette décision est la première, à notre connaissance, qui applique l’interdiction du cumul des sanctions dans le domaine administratif. Les implications de la décision sont majeures, tant et si bien que l’AMF a demandé et obtenu la permission d’en appeler devant la Cour d’appel du Québec. Si la décision était maintenue en appel, elle pourrait inciter les régulateurs à se coordonner davantage afin d’éviter que la situation de l’affaire Lavoie se reproduise.

Par MJulie‑Martine Loranger, Ad.E., Avocate émérite, et Me Gabriel Querry, associés chez McCarthy Tétrault, avec la collaboration de François Lalande, étudiant en droit chez McCarthy Tétrault

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1]      2023 QCCS 1222.

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