En avril dernier, l’Institut canadien des actuaires (ICA) publiait l’énoncé suivant : Une retraite reportée pour des prestations plus élevées, Adapter les programmes de retraite d’aujourd’hui aux réalités de demain. Cet énoncé est le fruit d’un travail de recherche et d’analyse rigoureux dont le processus vise l’atteinte d’un consensus auprès des membres de l’ICA.
Constat de départ de l’ICA
Le document présente ce constat de départ :
« Le système canadien de sécurité du revenu de retraite est composé d’un ensemble complexe d’arrangements interreliés, y compris des programmes financés par les particuliers, les employeurs et les contribuables. Bien qu’il existe de nombreuses façons de peaufiner ces arrangements, nous croyons que les gouvernements devraient envisager de mettre à jour l’âge de la retraite pour tenir compte du fait que les Canadiens choisissent déjà de travailler après l’âge de 65 ans et que cette tendance devrait s’intensifier au cours des prochaines années. »
On notera que les modifications proposées ne visent pas l’amélioration de la santé financière des programmes gouvernementaux ou la diminution des coûts de ceux-ci. À preuve, voici un autre extrait du document :
« L’ICA tient à souligner que le RPC/RRQ et la SV/le Supplément de revenu garanti (SRG), dans leur forme actuelle, devraient être financièrement viables pour les 40 à 75 prochaines années, et que ces régimes offrent la meilleure protection possible contre les risques combinés de l’inflation et de la longévité aux Canadiens qui n’ont aucune autre source de revenu à la retraite. »
Il s’agit plutôt d’adapter ces mécanismes afin qu’ils soient en mesure de faire face aux défis et besoins futurs
Contexte et évolution récente
Ces propositions s’inscrivent dans un contexte où se multiplient les options de report de prestations de toutes sortes. Dès 2013, l’ajustement, en cas de report de prestation du RRQ après 65 ans, passait de 0,5% par mois à 0,7% par mois. En 2015, le budget fédéral réduisait les retraits minimums applicables aux détenteurs de FERR âgés de 71 à 94 ans. Le retrait minimum à 71 ans passait de 7,38% à 5,28% du solde du FERR. Plus récemment, le Budget fédéral de mars 2019 proposait la création de la rente différée à un âge avancé qui permettra de reporter une portion des revenus du FERR jusqu’à l’âge maximal de 85 ans reportant, par le fait même, l’imposition de ces revenus.
Propositions de l’ICA
Voici l’essentiel des propositions contenues dans cet énoncé (rappelons-nous qu’il s’agit de propositions d’un groupe privé, pas de propositions gouvernementales)
Ces propositions visent principalement à permettre une plus grande flexibilité quant au report des prestations de ces différents mécanismes de retraite. Le but avoué de ces propositions est d’encourager les particuliers à reporter le début du paiement de ces prestations. L’objectif visé n’est pas de faire économiser ces régimes. À preuve, tant pour le RRQ que pour la PSV, les prestations reportées de 65 à 67 ans seraient augmentées ce qui n’était pas le cas dans le projet du précédent gouvernement fédéral de reporter l’âge d’admissibilité de la PSV de 65 à 67 ans.
Les perdants
Les auteurs de cet énoncé sont bien conscients que de telles réformes généreront inévitablement des perdants. Voici quelques réflexions tirées du document :
« L’une des principales préoccupations soulevées par cette proposition a trait à l’incidence sur les Canadiens qui sont incapables de travailler après 60 ans et qui doivent avoir accès aux prestations du RPC/RRQ avant 62 ans. Il ne s’agit pas d’un nouveau problème, car il y a probablement des Canadiens incapables de travailler après l’âge de 58 ans qui doivent attendre jusqu’à 60 ans pour commencer à recevoir des prestations du RPC/RRQ. L’ICA est d’avis que le report des prestations du RPC/RRQ pour la plupart des Canadiens qui peuvent se le permettre constitue une amélioration globale de la politique publique, et nous nous attendons à ce que le gouvernement continue de répondre aux besoins de cette minorité de Canadiens au moyen d’autres programmes. »
« À l’instar de la préoccupation soulevée au sujet du report à 62 ans de l’admissibilité au premier versement du RPC/RRQ, on s’inquiète de la nécessité, pour certains Canadiens, d’avoir accès aux prestations à des âges moins avancés. L’ICA est d’avis que le report des prestations de la SV pour la plupart des Canadiens qui peuvent se le permettre constitue une amélioration globale de la politique publique, et nous nous attendons à ce que le gouvernement continue de répondre aux besoins de cette minorité de Canadiens au moyen d’autres programmes. »
Il restera à voir quel type de programme pourrait être mis en place ou quels ajustements aux programmes existants pourraient être apportés pour faire face à ces défis.
En conclusion
La publication de cet énoncé ne vise évidemment pas à clore le débat sur le sujet du report de prestations mais bien au contraire à entamer des réflexions et discussions sur ce sujet.
Martin Dupras, a.s.a., Pl.Fin., M.Fisc., ASC
ConFor financiers inc.
Juin 2019