La faiblesse actuelle des taux d’intérêt constitue un défi de taille pour plusieurs retraités. Ces derniers, étant en mode de décaissement, décident fréquemment de réduire la proportion de leur portefeuille exposée aux marchés boursiers afin d’y augmenter le poids des placements à revenus fixes. Le niveau actuel des taux d’intérêt fait en sorte que plusieurs cherchent d’autres solutions.
Considérer les régimes de retraite dans la répartition d’actifs
Sans surprise, un participant à un régime de retraite à cotisations déterminées (CD) devrait considérer les actifs détenus dans ledit régime CD, et leur répartition, au moment d’établir sa répartition globale d’actifs. Pour les régimes de retraite à prestations déterminées (PD), de plus en plus d’experts tendent à considérer leur valeur à titre de placement à revenus fixes au bilan et dans la répartition d’actifs des particuliers. Les principales raisons sont les suivantes :
- Ces régimes sont bâtis pour procurer un revenu régulier;
- Tout comme la valeur des placements à revenus fixes, la valeur d’un régime PD tend à bouger à l’inverse des mouvements de taux d’intérêt.
On notera que le fait que la rente du régime soit déjà en cours de paiement, ou que le participant soit rendu à un âge tel que le transfert de la valeur du régime PD ne soit plus permis, pourrait constituer un défi d’évaluation de la valeur dudit régime, mais pas une raison pour ne pas inclure celle-ci au bilan et la considérer dans la répartition d’actifs du particulier.
Il pourrait en être de même pour la valeur des régimes de retraite gouvernementaux, le RRQ et la PSV. Sur son site, l’IQPF offre des calculateurs permettant d’estimer la valeur de ces deux régimes.
Utiliser le report des rentes gouvernementales
Ma chronique d’avril dernier présentait des simulations de report des rentes gouvernementales. Est-ce que de tels reports pourraient constituer une solution au défi actuel? Afin de répondre à cette question, imaginons un cas. Un homme de 65 ans en bonne santé à droit aux rentes de retraite maximale (en janvier) des deux régimes, RRQ et PSV, c’est-à-dire 14 499 $ et 7 384 $. Il détient également 750 000 $ en REER.
S’il décide de demander le paiement des deux rentes dès 65 ans, et, en considérant un rendement net de 4,00% sur ce REER et un taux d’inflation annuel de 2,00%, voici les revenus annuels indexés qu’il peut recevoir jusqu’à 90 ans environ :
RRQ | PSV | REER/FERR | Total |
14 499 $ | 7 384 $ | 38 000 $ | 59 883 $ |
Le tableau suivant présente la valeur de ces actifs à 65 ans :
RRQ | PSV | REER/FERR | Total |
294 661 $ | 149 171 $ | 750 000 $ | 1 193 832 $ |
Note : Nous avons utilisé les outils de l’IQPF avec un taux d’actualisation de 3,50 % et un taux d’inflation de 2,00 %. Nous avons appliqué la bonification de ces deux rentes après 65 ans.
Imaginons que ce particulier cherche à détenir une proportion globale de 60 % titres à revenus fixes. Si on considère la valeur des deux régimes gouvernementaux comme des titres à revenus fixes, son REER devra en détenir 36 %. Ce faisant le total de ces titres à revenus fixes serait égal à 294 661 $ + 149 171 $ + 270 000 $ (soit 36 % de 750 000 $) pour un total de 713 832 $, soit 60 % de 1 193 832 $. Cette proportion serait assez stable dans le temps.
Si ce même particulier décidait de reporter à 70 ans sa demande des deux rentes gouvernementales, en présumant qu’il avait suffisamment cotisé au RRQ pour avoir droit à la rente maximale à 70 ans, il aurait forcément besoin de retirer plus de sommes de son REER pour compenser, durant les 5 premières années, l’absence de rentes gouvernementales.
Voici les revenus qu’il recevrait à 65 ans :
RRQ | PSV | REER/FERR | Total |
0 $ | 0 $ | 59 883 $ | 59 883 $ |
Voici ce qu’il recevrait à 70 ans :
RRQ | PSV | REER/FERR | Total |
23 868 $ | 11 087 $ | 31 160 $ | 66 116 $ |
Note : Nous avons utilisé une hypothèse d’inflation annuelle de 2,00% et de croissance du MGA de 3,00 %.
Le tableau suivant présente la valeur de ses actifs à 70 ans :
RRQ | PSV | REER/FERR | Total |
390 865 $ | 181 571 $ | 568 691 $ | 1 141 127 $ |
Imaginons que ce particulier vise toujours détenir une proportion globale de 60 % titres à revenus fixes. Si on considère la valeur des deux régimes gouvernementaux comme des titres à revenus fixes, son REER devra en détenir seulement 20 %. Ce faisant le total de ces titres à revenus fixes serait égal à 390 865 $ + 181 571 $ + 119 738 $ (soit 20% de 568 691 $) pour un total de 692 174 $, soit 60 % de 1 141 127 $. Cette proportion serait assez stable dans le temps.
En conclusion
Le report des rentes gouvernementales augmente le poids relatif des placements à revenus fixes dans la répartition globale. Dans le cas analysé, le report fait passer la proportion de placements à revenus fixes nécessaire au REER/FERR de 36 % à 20 % réglant ainsi une partie du défi cité en début de chronique. On notera que cette chronique ne constitue pas une recommandation de placement ou de répartition d’actifs.
Martin Dupras, a.s.a., Pl.Fin., M.Fisc, ASC
Fellow de l’IQPF
ConFor financiers inc.
Juillet 2021