J’ai longtemps soutenu que l’investissement éthique prendrait son envol après la prochaine récession –et nous nous approchons de ce point.
Pendant la récession financière de 2008-2009, les investisseurs ont vu la valeur de leurs portefeuilles diminuer sur une période de 18 mois. La priorité des conseillers consistait à limiter les pertes et à empêcher les clients de vendre au mauvais moment. Ce n’était pas le moment de leur suggérer d’intégrer davantage d’investissements éthiques dans leur portefeuille.
Comme je l’ai dit lors d’un panel à la conférence virtuelle Inside ETFs Canada en novembre, beaucoup de choses ont changé depuis lors. on a assister à une prolifération de produits ESG dans le secteur des fonds communs de placement (FCP) et des fonds négociés en Bourse (FNB). Les statistiques du secteur remettent désormais en question l’idée que les investisseurs doivent sacrifier la performance pour investir dans ce type de produits. Or, ce qui est encore plus important, c’est la préoccupation croissante que quelque chose doit être fait pour sauver l’environnement et pour tenir compte des injustices sociales généralisées.
Le marché haussier historique qui a pris fin en mars 2020 s’est arrêté à cause d’un virus, et non à cause de la cupidité des investisseurs, de la hausse des taux d’intérêt ou d’une bulle économique. Les inégalités sociales ont pris le devant de la scène avec cette récession. Rien que cette année, on a assisté à des incendies massifs, des ouragans et des manifestations pour les droits des minorités et les questions relatives aux femmes.
Par conséquent, il est temps de parler des possibilités qui existent en matière d’investissements prenant en compte les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Les conseillers qui n’en profitent pas risquent de perdre l’accès à la deuxième génération de clients : les enfants de vos clients, qui chercheront de plus en plus à avoir un plus grand sentiment de contrôle sur l’avenir dont ils hériteront grâce aux investissements qu’ils feront.
Et ces enfants auront probablement les fonds nécessaires pour avoir un impact significatif. Des données provenant de la firme MSCI sur les investisseurs indiquent qu’il y aura un transfert de richesse de 30 000 milliards de dollars des baby-boomers vers 90 millions des milléniaux – dont les plus âgés ont eu 40 ans – au cours des prochaines décennies. En outre, 67 % des milléniaux estiment que les investissements « sont un moyen d’exprimer une valeur sociale, politique et environnementale » (par rapport à 36 % des baby-boomers).
Il n’y a pas de plus grand compliment qu’un client vous demandant d’aider ses enfants dans leurs investissements. En aidant leurs enfants, vous renforcerez également votre relation avec vos clients et améliorerez votre compréhension de leur situation financière. Je veux avoir des conversations sur l’argent avec toute la famille et être là pour aider au transfert de richesse dans le temps.
Attendre que la jeune génération nous parle d’ESG est une occasion ratée. Les conseillers doivent être proactifs et disposer du vocabulaire et des outils d’investissement nécessaires pour mener la conversation sur les questions ESG.
Il n’est pas nécessaire d’être trop technique, mais il est important de connaître les grandes distinctions au sein du monde de l’investissement éthique. L’ESG et l’investissement socialement responsable (ISR) ont été utilisés de manière presque interchangeable pour désigner l’investissement éthique. J’ai utilisé les deux au fil des ans, mais à mesure que l’offre de produits de FNB s’élargit, je préfère travailler avec des investissements qui ont des filtres ESG pour constituer mes portefeuilles, par opposition aux produits ISR qui excluent certaines entreprises ou certains secteurs.
Dans ma pratique, les clients ne sont pas surpris lorsque j’évoque mon intérêt pour l’utilisation des produits ESG. Je les ai préparés à cette conversation au fil du temps avec mes articles et mes lettres d’information aux clients.
Parfois, la réponse est immédiate : « Ça m’intéresse ». D’autres fois, les clients plus âgés s’en remettent à leurs jeunes enfants comme clients potentiels. Parfois, il y a peu ou pas de réponse du client et je prends cela comme un signe que l’on en a assez dit. Les vraies conversations commenceront dans un monde post-pandémique, où les réunions pourront se tenir en personne, dans un environnement détendu.
En tant que gestionnaire de portefeuille discrétionnaire, j’ai commencé à intégrer les facteurs ESG dans mes portefeuilles il y a quelques années avec un FNB des marchés émergents qui comportait des filtres ESG. J’ai maintenant élargi mon offre pour inclure des portefeuilles qui sont 100 % ESG.
Ces portefeuilles sont construits avec la même structure globale et la même répartition des actifs que mes portefeuilles réguliers basés sur les FNB, comme je l’ai expliqué dans mes précédentes chroniques. En fonction du profil de risque du client, je conserve la même large pondération géographique. Je préfère utiliser des FNB avec des filtres ESG qui n’excluent pas les entreprises ou les secteurs, mais se concentrent plutôt sur une sélection de titres des leaders de leur catégorie en matière d’ESG afin de composer les positions principales du portefeuille. Les positions satellites du portefeuille peuvent être plus thématiques et avoir une méthodologie de construction d’indice différente, comme l’investissement d’impact ou l’ISR.
Quelle que soit la méthodologie utilisée pour construire un portefeuille, il est important d’être convaincu de l’approche. Les clients qui veulent faire une différence en investissant de manière éthique se tournent vers leur conseiller pour obtenir les meilleurs conseils possibles. Notre relation de confiance ouvre la porte à ces discussions et nous met aux commandes lorsqu’il s’agit du choix des produits.
Mary Hagerman est conseillère en placement chez Raymond James Ltd. Le point de vue et les opinions contenus dans l’article sont ceux de l’auteur. Raymond James Ltd est membre du Fonds canadien de protection des épargnants.