Je vous propose donc un petit guide pratique pour tenter de cerner le processus que suivra la plainte et de vos obligations en cette matière. Dans cette chronique, nous aborderons la plainte que vous ou votre courtier recevez directement. Ma prochaine chronique portera sur la plainte logée à la Chambre de la sécurité financière ou à l’Autorité des marchés financiers.
Une plainte, c’est sérieux!
Commençons par mettre une chose au clair : le client qui prend de son temps pour se plaindre est forcément d’avis qu’il a un motif de le faire.
Bien entendu, nous avons tous différents types de clients, certains étant plus revendicateurs, exigeants ou, il faut se le dire, critiques que d’autres. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’y a aucun fondement à leur plainte et que vous devez balayer celle-ci du revers de la main.
À compter des premiers signes, que ce soit l’expression d’un mécontentement ou la réception d’une plainte formelle, faite preuve de mesure, de professionnalisme et de retenue dans le traitement de celle-ci. Une telle attitude maximisera les chances que le tout soit réglé à l’avantage de toutes les parties.
Le client se plaint directement auprès de vous
Les attentes de votre client n’ont pas été rencontrées ou vous en avez « échappé une »? Si vous avez une bonne relation avec votre client ou que celui-ci a une nature franche et directe, il est fort possible que la plainte atterrisse sur votre bureau dans un premier temps.
Il est impératif de connaître les procédures de votre courtier ou cabinet en matière de traitement des plaintes. En effet, la règlementation impose aux courtiers et aux cabinets d’avoir une politique de gestion des plaintes. Forcément, cette politique s’applique aux conseillers de l’organisation. Vous devez donc vous y conformer.
Outre le suivi de la politique de gestion des plaintes de votre organisation, vous aurez intérêt à poser les gestes suivants, dans la mesure où ils sont compatibles avec ladite politique :
- Écouter le client et noter ses doléances;
- Éviter de confronter ou de conforter le client, contentez-vous à ce stade de recueillir les motifs de ses reproches;
- Informer le client que vous ou quelqu’un de l’organisation lui reviendra dans un délai raisonnable afin de traiter sa plainte adéquatement;
- Avertir votre supérieur immédiat et votre département de conformité;
- Effectuer la revue du dossier de ce client pour évaluer vos actions;
- Avertir votre assurance responsabilité professionnelle.
Une fois informée, votre organisation mettra en branle un mécanisme pour vous accompagner dans le processus de gestion de la plainte et pour assurer le traitement équitable de celle-ci pour le client.
Il peut être tentant dès ce stade de tout nier ou, au contraire, de tout avouer et de chercher à compenser le client. Ce sont des réactions tout à fait normales mais qui sont probablement prématurées et émotives.
Prenez un peu de recul et faites confiance à votre organisation pour assurer la gestion du dossier. Il sera temps, plus tard, de faire réponse au client et cette réponse sera adaptée à la situation.
Le client se plaint auprès de votre organisation
Le même processus que nous avons abordé précédemment se mettra en branle. Cependant, puisque c’est votre organisation qui aura reçu la plainte et non vous, votre contribution au processus sera différente en ce que c’est votre organisation qui vous sollicitera, lorsque besoin, pour compléter son investigation.
Il peut toutefois être pertinent d’informer votre assurance responsabilité professionnelle.
Il est aussi important de savoir que la règlementation impose aux courtiers et aux cabinets de gérer les plaintes avec diligence et équité.
Vous ne pouvez donc pas vous attendre à ce que votre organisation prenne à tout coup votre défense à 100%. Gardez en mémoire que le but du processus est de déterminer si la plainte est réellement fondée et, le cas échéant, de régler le problème à son origine.
La conclusion du processus
Une fois l’investigation complétée, votre organisation consultera sans doute ses conseillers juridiques afin de s’assurer de la légalité et de la force de sa position. Notons que vous pouvez, à titre de conseiller, consulter en tout temps votre avocat pour obtenir conseil.
La plainte peut être rejetée ou retenue, en tout ou en partie. Dans tous les cas, le client conserve ses pleins droits de recours auprès de l’Autorité des marchés financiers et de la Chambre de la sécurité financière.
En termes clairs, même si vous signez un chèque, vous n’êtes pas à l’abri d’une plainte disciplinaire ou pénale. La nature de ces procédures est totalement étrangère au règlement qui peut intervenir entre un représentant et son client. De plus, il est illégal d’offrir une compensation conditionnelle au silence du client.
En conclusion, il est important de connaître le processus de gestion interne de votre organisation pour bien comprendre dans quel mécanisme vous vous retrouverez si une plainte était logée par un de vos clients.
Également, gardez en tête que la modération, la retenue, le professionnalisme et la collaboration seront parmi vos meilleurs outils pour en sortir le mieux possible.
Prochaine chronique : votre client se plaint ( deuxième partie ) – le processus d’enquête et les recours de la CSF et de l’AMF.
Photo Bloomberg