Le potentiel de croissance économique à long terme dépend de deux facteurs : la participation de la main d’oeuvre et la productivité. Depuis les 40 à 50 dernières années, nous avons profité de plusieurs vagues structurelles qui ont augmenté le potentiel de croissance économique de la planète et qui, du même coup, nous ont permis de supporter beaucoup plus de dettes.
L’arrivée en masse des femmes sur le marché du travail, la poussée démographique des baby-boomers et l’entrée fracassante des pays communistes et des pays émergents dans un système capitaliste mondialisé a dramatiquement poussé le potentiel de croissance économique vers le haut. Je n’ai pas besoin de vous dire qu’avec l’arrivée des microprocesseurs, de l’internet, de la création de logiciels de plus en plus sophistiqués, la productivité a fait un bond extraordinaire.
Dans son ensemble, ces changements nous ont permis de vivre une période dorée pour l’économie mondiale et ont même, à tort, remis en cause l’existence de cycle économique. C’était le nirvana économique, ou ce que les américains ont appelé, la « Goldilocks Economy ». Cette croissance, plus élevée et plus stable que prévue, a créé un sentiment de confiance qui a permis aux investisseurs d’être plus agressifs tant dans leur prise de risque que dans leur endettement.
Malheureusement pour nous, les conditions économiques ne sont plus aussi favorables aujourd’hui. Le taux de participation des femmes au marché du travail s’est stabilisé, l’apport marginal des pays émergents et en voie de développement, en termes de nombre et de coûts de la main d’œuvre, a grandement diminué et nous commençons à subir les premiers effets du vieillissement de la population. Par exemple, des pays comme le Japon ont commencé à vivre une diminution de leur population active.
Le thème de la productivité est moins évident, mais on peut dire que les gains les plus faciles de l’informatisation ont été faits et que sa contribution au potentiel de croissance économique est désormais marginale. L’innovation étant un phénomène non-linéaire et discret, il se peut par contre, qu’une nouvelle technologie nous permette de repartir la machine.
Les implications du ralentissement du potentiel économique sont nombreuses. Tout d’abord, il sera de plus en plus difficile de soutenir la croissance nécessaire pour supporter les niveaux de dettes actuels. De plus, la croissance économique sera plus influencée par le facteur productivité que par le facteur travail. Ceci implique une vague de fond structurelle poussant vers la désinflation ou même la déflation. En dernier lieu, la productivité dépend en grande partie de l’innovation et des conditions qui permettent de générer des rendements en ligne avec la prise de risque nécessaire à l’innovation.
Dans ma dernière chronique, je vous parlais de l’incapacité du monde politique de faire les choix difficiles pour créer les conditions gagnantes. Si on ajoute à ça la tendance forte d’une société légaliste à décourager la prise de risque, je doute que nous puissions réussir à générer la croissance économique nécessaire pour régler la situation d’endettement excessif sans avoir à le faire de façon désagréable.
Nous sommes dans une période où le retour du capital est aussi important que le retour sur capital. Je vous conseille donc de profiter de ces superbes années de rendements pour mettre de côté une partie de vos gains dans des véhicules comportant peu de risque, comme vous le feriez au casino après une série de mains gagnantes
Ce texte provient du Stratège, une publication de l’Association de planification financière et fiscale (APFF), et a été écrit par Pascal Duquette.